Blue Collar – Mercredi 3 octobre à 19h

Paul Schrader – 1978 – Etats-Unis – VOSTFR – 1h54

Mercredi 3 octobre à 19h

Zeke, Jerry et Smokey travaillent dans la même usine de construction automobile aux États-Unis depuis des années. En dehors de l’usine, ils forment une bande de potes qui dépense leur temps et leur salaire pour se réunir au bar, pour boire, se droguer ou baiser loin de leurs familles. C’est leur seul moyen de supporter l’exploitation quotidienne. Comme la plupart des ouvriers, ils ont bien compris comment le syndicat travaille main dans la main avec les patrons et les contremaîtres pour la bonne gestion de l’usine. Les auto-proclamés représentants des ouvriers ne servent qu’à pacifier les conflits et la rage intériorisée par les ouvriers de peur de se retrouver au chômage. Et quand ça ne suffit pas, ils se donnent les moyens de faire taire la révolte. Les problèmes ne s’arrêtent pas à la sortie de l’usine : Zeke se retrouve à devoir payer une amende colossale par rapport à son salaire parce qu’il fraude les allocations familiales. Pour sortir de ce quotidien de misère, il propose à ses amis d’aller chercher l’argent là où il se trouve : dans les caisses… du syndicat.

Blue Collar nous fait partager les difficultés, les espoirs et les déconvenues de ces ouvriers qui n’accordent aucune révérence à leur outil de travail ou à ce qu’ils produisent. Blue Collar reste un film particulièrement drôle, qui parvient à transmettre toute la vitalité de ce groupe d’amis. L’intérêt de projeter un tel film aujourd’hui se comprend très bien par ses scènes remplies d’un humour piquant qui visent juste sur de nombreuses questions : l’enfer des chaînes de montage, le rôle du syndicat dans l’usine, le racisme et la question raciale dans le contexte particulier des Etats-Unis, les rapports familiaux et la misère qui les enterrera tous, à moins qu’ils ne parviennent à s’en tirer avec assez d’argent pour ne plus jamais avoir à travailler…

La Vie de Brian – Mercredi 21 novembre à 19h

Terry Jones – 1979 – Royaume-Uni – VOST – 92min

Mercredi 21 novembre à 19h

Le 25 décembre de l’an O, Marie et son bébé Brian reçoivent la visite des Rois Mages, guidés par une étoile vers cette étable. Alors que les Rois Mages idolâtrent le petit Brian, ils se rendent vite compte qu’ils se sont trompés d’étable. Ils reprennent alors leurs présents et se dirigent vers l’étable voisine. 33 ans plus tard, un certain Jésus prêche à qui veut l’entendre. Quant à Brian, il se trouve toujours sous l’emprise de sa mère et rejoindra le Front de Libération Judéen, qui a pour mission d’enlever Mme Ponce Pilate, aux cris de « romans go home ! ». C’est alors que commence la vraie vie de Brian, considéré malgré lui comme le nouveau Messie. La film n’est pas une simple critique de la religion, mais aussi une réflexion sur les réponses spirituelles à la misérable condition humaine. Dans ce film absurde et loufoque où l’on rit du début à la fin, on passe par une scène où l’on se fout aléatoirement de la gueule des partis armés italiens des années 70, de l’idéologie lutte-armatistes et des politiques identitaires, à une autre où c’est le réformisme qui se voit ridiculisé, en passant par une grande tirade stirnerienne et autres gags subversivement hérétiques et perchés. Les Monty Pythons ont vu leur film interdit dans de nombreux pays, encore aujourd’hui, ce film étant jugé insultant à l’égard de Dieu, blasphématoire et hérétique, alors que c’est bien la condition humaine qu’ils piétinent joyeusement, et non un quelconque ectoplasme tristement céleste.

« Always Look on the Bright Side of Life… »

Le mois de juillet a commencé : les horaires changent

Jusqu’à la fin du mois d’aout, les permanences ont lieu le vendredi de 16h à 19h et les groupes de lecture le samedi à 16h.

Les permanences sont suivies du ciné-club une semaine sur deux, l’autre semaine, c’est projection libre.

La première projection libre a donc lieu vendredi 6 juillet à 19h : ceux qui veulent amènent un film, on en discute, et on choisit ensemble ce qu’on projette. A vos propositions !

Quelle place pour des perspectives révolutionnaires dans les mouvements sociaux ? – vendredi 15 juin à 19h

vendredi 15 juin à 19h

Dans le contexte du « mouvement social » du printemps 2018, nous proposons de se réunir pour discuter du rôle que peuvent aujourd’hui tenir et trouver les perspectives révolutionnaires dans la forme de contestation qu’est le mouvement social.
Un mouvement social, tel que celui que nous voyons aujourd’hui, se définit par ceci qu’il n’est pas explicitement (ou manifestement) révolutionnaire, étant donné qu’il se développe à partir de luttes partielles autour d’enjeux qui ne trouvent généralement d’autre forme d’expression que des revendications réformistes (ici, la lutte pour « une école plus démocratique et égalitaire », ou contre la « casse du service public », par exemple). Néanmoins, ces enjeux restent sociaux, c’est-à-dire qu’ils s’inscrivent quoi qu’il en soit dans une conflictualité sociale existante qui contient elle-même les germes et les potentialités d’une attaque révolutionnaire de la société (au même titre que d’autres formes, parfois plus sociales et diffuses encore, selon les périodes). Mais pour cela, il faudrait que cette contestation se place au niveau des logiques fondamentales de l’existant et qu’elle ne se limite pas seulement à ses expressions temporaires et conjoncturelles (par exemple la loi ORE, ou la loi Asile et immigration).
Le mouvement social n’étant donc pas révolutionnaire en soi et en acte (mais seulement en puissance), la question du développement de perspectives et d’une praxis révolutionnaires en son sein se pose, avec d’autant plus d’acuité que nous le vivons présentement : comment intervenir, sur une base révolutionnaire, dans un mouvement social ? Cette question implique en retour de se poser celles des formes que prend la contestation dans de tels mouvements (manifestations, blocages, occupations, grèves, sabotages, etc.) ainsi que les manières par lesquelles ces formes se déploient.
Un retour sur les mouvements sociaux des cinquante dernières années permettrait également de poser la question de la place qu’ont pu y prendre des perspectives révolutionnaires, avec toujours, l’horizon possible de leur désertion, mais alors, au nom de quoi et pour quoi ? Quelles conditions peuvent influer sur la possibilité d’un dépassement des mouvements sociaux ? De tels questionnements permettraient de discuter de façon critique des derniers discours en vogue comme des vieilles rengaines dans les mouvements sociaux (citoyennisme, appellisme à la sauce réformiste : « contre Macron est son monde », para-syndicalisme, logiques de main d’œuvre et de représentations, corporatismes, travaillisme, fétichismes formels, etc.), comme une proposition également, de poursuivre des débats en cours (Entre politique et « insouci », Convergence des luttes vs dépassement, …).
En bref, il s’agira de discuter des possibilités (ou non ?) de développement des perspectives révolutionnaires dans les mouvements sociaux.

Les paradis artificiels – vendredi 8 Juin à 19h

Vendredi 8 Juin à 19h

 

L’expression de paradis artificiels proposée par Charles Baudelaire dans son essai du même nom est largement redondante : tout paradis est artificiel. Mais cela n’enlève rien – au contraire – à la charge poétique de la locution qui, à son origine, désignait les stupéfiants. Nous l’entendrons ici dans un sens plus large, quoi que non figé, qui pourrait être résumé par : ce qui donne l’impression de pouvoir – pour un moment – s’échapper de ce monde. De fait, fumer des joints régulièrement tout autant que courir 10 km en sortant du boulot peuvent s’avérer être des paradis artificiels en tant qu’ils contribuent à mieux nous faire accepter la merde quotidienne.

Il ne s’agira donc pas dans cette discussion de se limiter aux stupéfiants ni de tomber dans une condamnation morale, culpabilisatrice et simpliste de la place que chacun donne à ses paradis artificiels mais de penser leur rôle central dans la pacification sociale et la résignation généralisée, comme un rapport détaché avec l’existant qui prend le pas sur le réel. Respirer, penser à autre chose, se couper des autres (ou s’y relier dans l’isolement), prendre du recul sur sa propre existence et sur les problèmes qui l’accompagne : on pourrait sans trop se tromper dire que tout le monde peut avoir besoin de béquilles ou de prothèses pour tenir le coup. Mais, de la même manière que la récré et les loisirs servent à nous rendre bien dociles au cours de l’année scolaire ou de travail, ces moments de désertion illusoire du monde ne devraient pas servir à nous faire mieux supporter la réalité de ce dernier. Accepter les pires conditions de travail pour être « libre » cinq semaines par an, n’est-ce pas précisément ce sur quoi repose notre propre asservissement ?

L’alcool, la drogue (qu’elles soient dites « dures » ou « douces »), l’amour, la littérature, la télévision, la religion, le sexe, la politique, le divertissement, la chimie sur ordonnance, le travail, l’idéologie et la théorie, la technologie, le virtuel, la philosophie, l’art, la culture, le jeu, l’hygiène, etc. Mais aussi, peut-être, l’enfermement dans la normalité parallèle de l’alternative. Toutes ces choses sont-elles bien des paradis artificiels ? Il serait bien triste de le penser si cela implique de refuser tout plaisir ou toute aide pour supporter ce monde. Plutôt que d’interroger ce qui serait l’essence de chacune de ces pratiques, il peut être plus intéressant de questionner notre rapport à ces dernières.

Il s’agira donc de discuter, dans une perspective révolutionnaire et en réfractaires à ce monde, des limites des paradis artificiels, de la notion de réel et de notre rapport à ce dernier.

A l’époque de la post-modernité, les paradis artificiels affinent leur rôle plus que jamais et prospèrent de la chute des grandes hypothèses révolutionnaires. Poser la question des paradis artificiels, c’est ainsi poser la question du refus de ce monde et des perspectives que ce refus propose : la fuite dans un ailleurs illusoire ou la confrontation ici et maintenant.

Tout ceci ce questionne, bien évidemment, et se discute, se réfléchit, en s’évitant à tout pris la forme groupe de parole.

Tout texte, extrait vidéo ou audio, musique ou autre qui puissent nourrir la discussion sont bienvenus et pourront être partagés le soir de la discussion.

Nausicaä de la vallée du vent – lundi 25 juin à 19h

Hayao Miyazaki, 1984, vostfr, 1h56

lundi 25 juin à 19h

« Je ne peux pas croire qu’il s’agisse de la même personne… sous le coup de la colère, elle n’est plus elle-même. On dirait un ômu brûlant d’une rage destructrice…»

Mille ans auparavant, les dieux guerriers ont détruit la terre en sept jours de feu (à voir dans Giant God Warrior Appears in Tokyo, produit par les studios Ghibli en 2012, et projeté au début de chaque ciné-club du présent cycle sur les Kaijus). Le vivant et ses insectes ont repris le dessus, et la fukai, cette gigantesque forêt qui ne cesse de gagner du terrain, envahit tout, rase les villages avec ses spores toxiques. La forêt pourrit l’air, rendu donc irrespirable sans masques à gaz. C’est dans ce monde post-apocalyptique remplis de Kaijus que Nausicaä vit et respire dans une vallée balayée par des vents salvateurs. Tout cela apparemment sans heurts… Si ce n’est l’avancée de la fukai mystérieuse d’un côté et celle de la malveillance dominatrice humaine de l’autre.

Un monde ravagé, ou subsiste un éclat d’espoir, un monde qui tue l’humanité, des animaux géants qui laissent parler leur rage incompréhensible, des champignons toxiques d’une beauté propre à l’imagination de Hayao Miyazaki, c’est ce que propose cette dystopie de 1h50. S’y joue la cruauté humaine qui fait loi dans ce monde, une réflexion sur la nature d’un monstre, d’un Kaiju.

L’innocence bienveillante fait face à la peur, à la répulsion, et la domination, au pouvoir. Nausicaä, à la manière d’un renard-écureuil ou d’un Omu, fait face à ce monde en montrant les griffes et des yeux rouges, ou calmement et le regard paisible. C’est dans ce film l’affrontement entre l’humanité et le sauvage qui se joue, avec tous leurs liens complexes, et Nausicaä en étrange équilibre entre les deux.

Made In Britain – lundi 11 juin à 19h

Alan Clarke, 1982, vostfr, 1h16

lundi 11 juin à 19h

Dans une période d’insignifiance et de confusion politique extrême comme la nôtre, il est intéressant de se pencher sur le fait que la révolte, point de départ nécessaire à toute transformation sociale, est effectivement de nature à pouvoir partir dans tous les sens. Qu’elle se trompe en se dirigeant à l’endroit de boucs émissaires désignés par le pouvoir ou par l’imbécillité collective, qu’elle emprunte les chemins d’un nihilisme désobéissant aux uns pour mieux ériger l’obéissance à d’autres et à Dieu en principe mortifère comme le propose aujourd’hui l’option djihadiste, voyage inclus, ou bien qu’elle s’attelle à des perspectives émancipatrices, la révolte est toujours à la fois un produit et une réponse à ce monde carcéral de misère ; misère sociale, économique, affective, politique, etc. Dans ce film brutal, court et marquant, on suit le parcours de Trevor, jeune homme enragé de 16 ans, ballotté entre l’agence pour le chômage, le centre social et le pavé, qui, face à l’ennui et l’absurdité capitaliste, ne trouve que le racisme pour exprimer sa rage aveugle, se flanquant d’une croix gammée entre les deux yeux, comme provocation et défiance ultime. A travers lui, ses idées infâmes, sa transgression, c’est au nihilisme contemporain et existentiel que l’on touche, le sien d’abord, et celui de la répression ensuite. Car la révolte, quelle que soit sa nature, entraîne sa réponse étatique, sous la forme de la répression ou de l’intégration. Ce nihilisme ancré dans la pénurie sociale et culturelle mérite que les révolutionnaires se penchent dessus avant qu’il ne vienne à bout de leurs perspectives en transformant les individus en traders ou en Trevor.

Akira – vendredi 31 août à 19h

Katsuhiro Otomo, 1988, vostfr, 2h04

vendredi 31 août à 19h

Akira est un film d’animation prenant place en 2019 dans un Tokyo post-apocalyptique, reconstruit suite à sa destruction  trente ans plus tôt à cause de ce qui semblerait être une bombe atomique. Dans ce Neo-Tokyo, sale, ravagé par la drogue, les sectes et les combats entre gangs de motards, des émeutes incontrôlables éclatent tous les jours à tel point que l’armée est obligée d’intervenir, en vain. Le film nous raconte l’histoire de Kaneda, un lycéen en maison de correction, leader d’un gang de motards. Suite à une baston en moto avec un autre gang et la rencontre avec un être étrange, doté de pouvoir paranormaux, un des membres du gang de Kaneda, Tetsuo, va se faire enlever par l’armée qui mènera des expériences sur lui.
Comme le film Testuo, que nous avions projeté dans le cadre du ciné-club, Akira aborde des thématiques propres à un genre qu’il a contribué à faire émerger, le « cyber punk ». Les questionnements du film sont portés à la fois dans sa narration et dans son esthétique, accompagné d’une bande son angoissante, parfois bruitiste (respirations, frottements de tuyaux…). Akira est une réflexion sur l’urbanisme, avec ses échelles écrasantes, ses immeubles imposants, nimbés de pubs et de verre, symptomatique un développement incontrôlable, du capitalisme et de l’emprise urbaine sur les individus. Le film nous questionne également sur la prothèse cybernétique, la modification corporelle génétique, la technologie et l’énergie nucléaire toujours au service du pouvoir et du maintien des rapports de domination.

Programme de juin à août 2018

Consulter/télécharger le programme de juin à août 2018 pour lecture web.

Pour la version à imprimer en A3 cliquer

En juin :

  • Permanences : jeudi 17h – 20h et dimanche 15h30 – 19h30
  • Ciné-club : lundi tous les 15 jours – 19h
  • Groupes de lecture : samedi – 16h
  • Ciné-club enfants : dimanche tous les 15 jours – 15h30

En juillet et en août :

  • Permanences : vendredi 16h – 19h
  • Ciné-club : vendredi tous les 15 jours – 19h, les autres permanences seront suivies de projections libres
  • Groupes de lecture : samedi – 16h



Edito :

Depuis ce printemps, quelque chose comme un mouvement tente de se déployer. Occupations, manifs, grèves des transports, blocages, sabotages… Des partiels sont bloqués, l’idée de se donner enfin les moyens de bloquer le bac commence à circuler… des ingrédients sont là. Mais le goût de la sauce peine encore à piquer assez fort.
Et il y a bien de quoi être nombreux à vouloir en finir avec l’existant : tous triés aux frontières, à l’école, à pôle emploi, et tous envoyés là où on sera rentable, assignés à un statut de merde, un taf pourri, des miettes d’allocations en échange des preuves d’une bonne insertion en cours. Voilà la réussite que propose ce monde, voilà la bonne gestion que cherche à produire la loi ORE et l’ensemble de l’arsenal législatif dans laquelle elle s’insère. On pourrait donc bien vouloir tout liquider…
Pourtant, c’est surtout 68 qui finit d’être liquidé dans son énième commémoration (à Monoprix, comme à la CGT ou dans les ventes d’art contemporain). Loin de dégager un terrain propice à ce que s’inventent enfin les prémices d’une révolution qui pourrait venir, cette liquidation sordide semble bien emporter avec elle les dernières bribes d’une époque ou cette perspective vivait. Et, faute de perspectives révolutionnaires peut-être, le mouvement actuel peine à se donner les moyens de son autonomie et de son débordement, et se laisse piéger dans l’enfermement dans des facs occupées défendues comme des territoires (« ZAD partout »), dans la folklorisation de la radicalité en manifestation et dans la gestion bureaucratique des pratiques militantes et la politicaillerie des lectures identitaires et paternalistes autour desquelles se recompose la gauche de la gauche.
Alors pour essayer de partager questionnements et analyses, on propose de discuter, le 15 juin, pour l’occasion, de la place des perspectives révolutionnaires dans un mouvement social, dans celui d’aujourd’hui, dans ceux du passé, et en général. On pourra ainsi poursuivre la réflexion entamée autour de la discussion de l’été dernier sur l’opposition entre convergence des luttes et dépassement, tout en se posant actuellement et inactuellement la question des moyens et des perspectives qu’on se donne pour intervenir. Par ailleurs, la liquidation des perspectives révolutionnaires par l’enfermement dans des arrière-mondes séparés, bien que s’incarnant dans le mouvement actuel, relève également d’une logique plus large, que l’on tentera d’approcher le 8 juin en se posant la question des paradis artificiels comme fuite hors du réel.
Dans le cadre des groupes de lecture, on cherchera à s’y retrouver dans les propositions politiques qui frayent plus ou moins leur chemin aujourd’hui, en particulier en lisant ensemble l’Appel (quitte à froisser quelques amis, nous pensons qu’il est maintenant temps de confronter la proposition qui s’est formulée dans le petit livre marron il y a quinze ans à ce qu’elle est devenue aujourd’hui), et en lisant des textes autour de la question de la territorialisation des luttes.
Et puis on poursuit le ciné-club des adultes avec les gros monstres qui n’ont toujours pas peur des ruines et portent sans doute toujours dans leur coeur un monde nouveau, et d’autres films qui nous ont semblé propices à la discussion, et celui des enfants, qui regarderont bien ce qu’ils voudront.
En juin, pendant les permanences du jeudi et du dimanche, la bibliothèque est ouverte à tous pour discuter de tout ça, donner des nouvelles, en prendre, proposer des idées de discussion, de projections ou autres, questionner ce projet, apporter des livres pour la bibliothèque, en emprunter, déposer des tracts, revues, brochures, journaux pour la diffusion, venir en chercher… et même amener de l’argent dont la bibliothèque a structurellement besoin (sans assignation aucune, sauf celle des huissiers).
A partir du mois de juillet, les permanences se dérouleront le vendredi et seront suivies une semaine sur deux de projection libres : tous ceux qui viennent peuvent amener un film et le proposer.

La raison du plus faible – lundi 2 juillet à 19h

Lucas Belvaux, 2006, Belgique, 1h56

lundi 2 juillet à 19h

Inspiré par la fameuse prise d’otage de Tilff en 1989, La raison du plus faible est à la fois un film de braquage et un film « social ». Les personnages font corps avec les décors glauques de l’environnement urbain liégeois, avec la misère, l’ennui, l’alcool, l’usine et le chômage, mais aussi avec le sentiment d’injustice et la révolte que produit ce monde. Un petit groupe de pieds nickelés, à la fois traversé de bonhommie, de courage et d’inexpérience, décide de sortir de l’apathie de l’absence de luttes et de solidarité, en allant chercher l’argent là où il se trouve, dans un geste à la fois audacieux et, pour certains, désespéré. S’ensuit une aventure humaine, un regain d’espoir dont l’efficacité et la réussite semblent hors de portée tant l’aventure consiste, d’abord et surtout, à retrouver la dignité perdue sur les lignes d’assemblages, dans le fond des bouteilles, dans les cellules des prisons, dans la morne gangue urbaine, dans les tickets de loto qui ne font que ruiner ceux qui le sont déjà, écrasant les espérances contre le béton de la réalité du vieux monde. Loin du pathétique et de la démagogie populiste dans lesquelles ce genre de film sombre parfois, Lucas Belvaux présente ici des personnages complexes pris dans des rapports d’exploitation et de misère face auxquels ils sont rendus impuissants par l’absence de réponse à la hauteur du drame. Si le film accède à la grâce dans ses derniers instants, c’est bien que toute tentative de reprendre sa vie en main en ses propres termes constitue déjà, en soi, un acte de guerre contre l’existant. Résonnant face à l’insignifiance, ce film est un hymne à la révolte, un hommage à la conséquence de ceux qui franchissent le pas, répondant à la peur : « C’est avant d’y être qu’il faut que tu saches jusqu’où tu veux aller ».