Alan Clarke, 1982, vostfr, 1h16
lundi 11 juin à 19h
Dans une période d’insignifiance et de confusion politique extrême comme la nôtre, il est intéressant de se pencher sur le fait que la révolte, point de départ nécessaire à toute transformation sociale, est effectivement de nature à pouvoir partir dans tous les sens. Qu’elle se trompe en se dirigeant à l’endroit de boucs émissaires désignés par le pouvoir ou par l’imbécillité collective, qu’elle emprunte les chemins d’un nihilisme désobéissant aux uns pour mieux ériger l’obéissance à d’autres et à Dieu en principe mortifère comme le propose aujourd’hui l’option djihadiste, voyage inclus, ou bien qu’elle s’attelle à des perspectives émancipatrices, la révolte est toujours à la fois un produit et une réponse à ce monde carcéral de misère ; misère sociale, économique, affective, politique, etc. Dans ce film brutal, court et marquant, on suit le parcours de Trevor, jeune homme enragé de 16 ans, ballotté entre l’agence pour le chômage, le centre social et le pavé, qui, face à l’ennui et l’absurdité capitaliste, ne trouve que le racisme pour exprimer sa rage aveugle, se flanquant d’une croix gammée entre les deux yeux, comme provocation et défiance ultime. A travers lui, ses idées infâmes, sa transgression, c’est au nihilisme contemporain et existentiel que l’on touche, le sien d’abord, et celui de la répression ensuite. Car la révolte, quelle que soit sa nature, entraîne sa réponse étatique, sous la forme de la répression ou de l’intégration. Ce nihilisme ancré dans la pénurie sociale et culturelle mérite que les révolutionnaires se penchent dessus avant qu’il ne vienne à bout de leurs perspectives en transformant les individus en traders ou en Trevor.