Week-end Antitravailliste du C.A.T (Collectif Anti Travail)

Ce week-end, la bibliothèque des Fleurs Articles accueille le Week-end Antitravailliste du C.A.T (Collectif Anti Travail) . Retrouvez l’annonce du w-e et le programme en dessous !

Venez vite ! Venez nombreux ! On a du travail à abattre !

Ça y est, c’est le week-end : enfin un peu de répit après s’être fait vampiriser toute la semaine. Quelle joie, quelle allégresse ! Nous levons notre verre à mère Oisiveté, et à tous les vices dont elle nous gâte pour embellir notre vie.

Mais voilà, alors que l’on profite d’un temps qui n’a plus l’horloge autour du cou, soudain, une pensée nous traverse… lundi… Ça va recommencer. Et ça, c’est censé recommencer toutes les semaines, de tous les mois, de toutes les années, pendant quasiment toute notre vie ? Si c’est une farce, elle n’est pas drôle.

Il en va de même lorsque nous sommes au chômage ou au RSA ; une situation tout aussi injonctive à rester actif et qui l’est de plus en plus, ou même à faire semblant de chercher du travail. Nous sommes toujours plus mis sur la sellette, le CV sous la gorge, menacés de sanctions à la moindre suspicion d’absence de zèle.

En plus, voilà maintenant plusieurs années que le climat politique ambiant se teinte franchement d’une mise au travail à marche forcée. La réforme qui a vu en 2023 Pôle emploi se renouveler en France Travail nous accable de quinze heures d’activité obligatoire pour les allocataires du RSA et du chômage et resserre toujours plus les mailles du contrôle de l’activité des précaires. Maintenant, le gouvernement envisage de limiter la durée maximale des arrêts maladie à deux semaines, et un mois si prescrit par un hôpital.

Sommes-nous seuls à trouver que cette vie de chien n’est pas acceptable ? Il y a fort à parier que non.

Et si nous envisagions de foutre en l’air le travail et le travaillisme ? C’est ce que souhaite faire le C.A.T. à travers cette invitation à participer à un week-end anti-travailliste du vendredi 5 au dimanche 7 décembre 2025 à Paris.

Au programme, discussions et projection sur la nécessité d’élaborer une perspective de lutte anti-travailliste plus vivante et plus forte politiquement, surtout au vu de la relative apathie actuelle. Si vous lisez ces lignes et que vous en avez marre de ce monde d’exploitation et d’aliénation, n’hésitez pas à venir passer votre week-end avec nous pour espérer ensemble parvenir à prolonger la grasse mat’, à brûler France Travail, à faire bouffer leur cravate aux patrons et surtout à faire dérailler cette machine cruelle qu’est le capitalisme. Ce sera l’occasion d’échanger avec des camarades, des compagnons ainsi que des collectifs à propos des enjeux, limites et réussites rencontrés dans la lutte contre le travail.

Pour ce faire, le CAT vous invite au 45, rue du Pré Saint-Gervais, 75019 (Métro Place des Fêtes), dans un somptueux bar à chat. Nous vous attendons le vendredi dès l’après-midi.

Refusons par tous les moyens possibles le travail !

Le programme du W-E :

  • Vendredi 5 décembre : 18h Accueil // 19h30 : projection et discussion : La classe ouvrière ira au paradis, Elio Petri
  • Samedi 6 décembre : 10h30 : Groupe de lecture de textes sur le travail et l’anti-travail //
  • 14h Atelier «être en rupture avec le travail» – présenté par le RATO (Assemblée de Résistance au Travail Obligatoire) de Lille /// 16h30 – Discussion « actualité des luttes (Présentation des collectifs présents et discussion sur l’actualité de la lutte contre la mise au travail)
  • Dimanche 7 décembre : 10h30 : Discussion « histoire des luttes » autour d’une liasse de textes // 16h30 – Emission radio publique sur le travaillisme avec Radio Mad Max, une radio contre le travail, au bar TDTF (Paris 19e, 16h30)

— Le C.A.T.

Programme de septembre à décembre à la bibliothèque des Fleurs Arctiques

Cliquez sur l’image pour télécharger le pdf du programme

Pendant ce programme à la bibliothèque des Fleurs Arctiques, nous discuterons de la mobilisation du 10 septembre et de ses suites, de l’époque et de ce qu’elle charrie, de la post-modernité à ses critiques le plus souvent réactionnaire, des affects et de la démagogie et de la question de la discipline.

Nous discuterons également de l’affaire de Bruay en Artois dans le cadre d’un démontage judiciaire.

Nous projetterons lors du ciné-club : Les chiens ne portent pas de pantalon, True Grit, Le règne animal, Mother, Les chambres rouges et Starry eyes.

Les permanences auront lieu le mardi de 16h30 à 18h30.

Les groupes de lecture auront lieu le dimanche à 16h30

Projection de « Révolution 2023 par nous »

Dimanche 23 novembre 16h30

Nous projetterons dimanche 23, à la place du groupe de lecture, ce film sur les différents mouvement de l’année 2023, dont voici une présentation :

« Ce film n’est pas terminé. Nous le publions en avance parce que nous sommes rattrapé.e.s par la mobilisation du 10 septembre 2025 et souhaitons dans ce mouvement, animer des débats autour de vagues de mobilisation précédentes, notamment le mouvement des retraites et les émeutes consécutives à la mort de Nahel.

Ce récit lit 2023 non comme une simple succession de crises et révoltes, mais comme un moment où des lignes de classe refont surface. 2023, une année marquée par le retour de la forme traditionnelle de mobilisation, encadrée et centralisée. Le film tente d’interpréter l’intégration des mouvements aux schémas électoraux et à la constitution du pouvoir des nouvelles gauches. Comment est-ce que quelques semaines plus tard, de manière séparée, les émeutes consécutives à la mort de Nahel sont venues tout bousculer ?

Qu’est ce que l’autonomie dans la lutte ? A qui sert la « composition » ?  Quelles sont les perspectives de lutte révolutionnaire autonome aujourd’hui ?

Mais ne nous limitons pas à la critique des mouvement sociaux français, à l’heure où l’on pressent la mobilisation du 10, en Indonésie et au Népal, ça pète fort, parlons aussi de leurs mouvements, de leurs limites et des imaginaires qu’ils véhiculent. »

Plus d’info sur le film sur https://revolution2023.noblogs.org/

Starry Eyes

Lundi 15 décembre – 19h30

Kevin Kölsch
2014 – 98’

Jusqu’où peut on aller pour obtenir la célébrité et le succès? C’est la question basique que pose ce film, mais ce n’est pas de façon basique qu’il y répondra. Avec son petit job de merde, Sarah, qui souhaite percer à Hollywood se retrouve confrontée à une opportunité qu’elle ne peut pas refuser comme disait Don Corleone… On explorera donc la thématique chère à ce cine club du pacte avec le diable, 10 ans avant The Substance, 50 ans après Rosemary’s Baby.

Discipline quand tu nous tiens

Vendredi 12 décembre – 19h30

Suite à un groupe de lecture sur Surveiller et punir de Foucault qui aura lieu durant ce programme, on se propose de réfléchir aux implications politiques de ce qu’est la discipline dans notre situation contemporaine. Que signifie l’émancipation à l’aune d’un ordre politique dont la capacité d’intégration, de digestion et de recyclage de « ses » éléments récalcitrants n’a jamais été aussi forte ? Comment parvenir à faire rupture avec l’existant lorsque celui-ci prétend intérioriser cette possibilité même ? En témoigne actuellement la confusion permanente qui s’opère entre des postures étiquetées ou proclamées « radicales » et leur réalité en acte qui se traduit par un manque cruel d’engagement politique au nom d’un libéralisme social-démocrate où l’on prétend pouvoir tout être à la fois : vont alors bon train les contradictions patentes où l’on dit qu’il n’est pas contradictoire de voter et d’être anarchiste ; qu’il n’est pas contradictoire d’être libertaire, autonome ou révolutionnaire, et de flirter avec la gauche ; etc. On peut garder tous les possibles à la fois, et apparemment c’est cela être radical. Cette soi-disant radicalité désigne alors le caractère illimité de cette totalité de possibles virtuels tous déjà acquis de manière très discursive, là où elle devrait désigner au contraire une limite inatteignable pour l’existant, un au-delà de l’horizon et non pas une collection de lignes de fuite en trompe l’œil. Il apparaît par ailleurs que le pendant de cette radicalité pensée comme mosaïque idéale est une tendance à confiner l’action et la pratique concrète à des questions purement techniques et stratégiques qui toutes répondent à la seule question de l’efficacité : « comment donner à nos actions un maximum d’effet ? » ; ce qui constitue par là le pinacle des préoccupations disciplinaires, lesquelles ont initialement vu le jour dans le giron de l’armée et de ses exercices de déplacement collectif. Il est manifestement très difficile de faire rupture de nos jours et l’omniprésence de la discipline n’y est pas pour rien : parce que la discipline, ce n’est rien d’autre que l’exacte inverse de l’autonomie. C’est décupler ses possibilités, son intelligence et ses ressources d’autant plus qu’on s’assujettit profondément à cela-même qui va nous structurer, et par là épuiser tous nos potentiels alors qu’on extériorise dans une structure, une institution, une norme sociale, le principe même qui nous donne forme. Cet assujettissement profond qui occulte toute perspective potentiellement et réellement révolutionnaire a pour corollaire de donner la possibilité de manger à tous les rateliers. Il y a là comme une loi de proportionnalité qui s’observe : plus on abandonne au monde et à la société nos moyens d’être et de lutter, plus nos possibilités fleurissent, décorrélées des réels dommages qu’elles pourraient infliger ; à l’inverse, s’engager réellement, c’est nécessairement refuser de se garder des possibilité de par exemple faire carrière, la possibilité de s’aménager un petit futur mondain, de se garder un back-up plan par sécurité, et parier sur les potentiels inconnus de l’avenir. En outre, on pourra se demander comment comprendre la différence entre auto-discipline et autonomie, puisque cette dernière est souvent à notre époque associée à de la maîtrise et à du contrôle de soi et des autres ?

Les Chambres rouges

Lundi 1er décembre – 19h30

Pascal Plante
2023 – 118’

Les Chambres rouges est un film glaçant qui n’a besoin d’aucune scène de violence pour terrifier. On y retrouve la pesanteur de la perversion et la puissance possédante et depossédante de l’obsession. Le voyeurisme qui accompagne les affaires judiciaires les plus sordides est ici la toile de fond d’une rencontre troublée et troublante entre deux femmes chacune perdue à sa manière. Les «red rooms», légende urbaine de l’ère d’internet, ces live streams mettant en scène la torture, le meurtre, le suicide ou le viol d’êtres humains, ne sont au fond que la réactivation des questionnements sur les dits «snuff movies». Ici on s’intéressera à la réception plus qu’à la commission dans ce chef d’œuvre récent, froid et psychologique.

Démontage judiciaire : L’affaire de Bruay en Artois

Vendredi 28 novembre – 19h30

Saboter la machine judiciaire implique de comprendre comment fonctionnent ses rouages quand elle s’exerce, comment elle peaufine ses engrenages pour mieux nous broyer. Alors il nous a semblé pertinent de proposer des occasions de pratiquer ensemble des démontages, en se donnant le loisir d’accorder collectivement toute notre attention à des déconstructions aussi méticuleuses que possible d’affaires judiciaires précises, passées ou actuelles, pour mieux se préparer à affronter la justice et la répression quand nous nous retrouvons contraint de le faire. Chaque affaire est singulière, et toutes ou presque pourront nous intéresser, qu’elles aient défrayé la chronique, marqué l’Histoire ou qu’elles participent d’un fonctionnement quotidien d’une justice toujours trop près de la vie de tout un chacun, et on espère que comprendre ces affaires spécifiques nous permettra d’en savoir plus sur le fonctionnement de l’ensemble du dispositif, et de trouver comment s’y opposer. Concrètement, on propose un rendez- vous régulier et public (une fois par programme) pour plonger ensemble dans une affaire choisie préalablement selon les propositions ou occasions, et sur laquelle ceux et celles qui voudront le faire se seront penché en amont, à partir des documents et informations qu’on peut réunir selon les cas, pour restituer aux autres à la fois la construction de l’accusation et la stratégie de défense choisie ainsi que la manière dont elle s’est élaborée. On pourra ensuite tous discuter à partir de ces éléments, en s’inspirant des formes de prises en charge collective des défenses qui se sont développées dans les suites de mai 68, par exemple, mais sous une forme « désactualisée », hors des enjeux immédiats d’une défense réelle en cours. Pas besoin de connaissances spécifiques préalables, bien sûr, pour participer, d’autant plus que le point de vue que nous choisirons d’adopter c’est celui de tous ceux et touts celles qui peuvent se retrouver face aux tribunaux et qui ne sont pas prêts à laisser la machine judiciaire les broyer, et pas celui des spécialistes ou relais de la justice auquel trop souvent le champ libre est laissé, parce que tout est fait pour nous conduire à le leur abandonner. Il s’agirait donc au contraire de s’habituer à ne plus déserter le champ de l’élaboration collective, et de chercher à donner un sens concret à la notion de défense collective.
En 1972, une jeune fille de mineurs est retrouvée dénudée et assassinée. Le notaire de la ville, notable bourgeois à la moralité douteuse va très vite être présumé coupable du crime avec sa maîtresse. Il sera pourtant libéré faute de preuves convaincantes, et un ami de la jeune fille, fils de mineur lui aussi, va avouer le crime. Si ce cold case finalement sans résolution, puisque le jeune homme rétractera ses aveux quelques temps plus tard et sera lui aussi libéré, nous intéresse, c’est moins pour les méandres judiciaires qui aboutissent à la libération des deux accusés successifs, que parce que la GP, groupe maoïste alors nombreux et incarné ou soutenu par de nombreuses figures intellectuelles comme Sartre, Glucksman ou Maurice Clavel. Avec Serge July et François Ewald à la manœuvre, la GP décide de surfer sur l’émotion que suscite l’affaire et sur le mécontentement populaire face à une justice inefficace pour mener combat contre la « justice de classe », au nom d’une « justice populaire » digne de M le maudit. Ils se déplaceront sur place et organiseront un « procès populaire » du notaire, investi comme coupable idéal de ce qui devient un « meurtre de classe », en en faisant le représentant d’une bourgeoisie dégénérée, immorale (il est de notoriété publique que le notaire est libertin) qui assassine sauvagement le prolétariat. Le jeune homme qui avoue le crime est quant à lui innocenté par le « tribunal du peuple » auto institué au nom du fait qu’un prolétaire ne peut pas en assassiner un autre. Des articles de la Cause du peuple appellent au lynchage du notaire et certains proches du groupe maoïste, comme Sartre, s’en distancieront à cette occasion. Ce sera l’occasion de parler anti-judiciarisme et de mieux comprendre cette intervention à prétention révolutionnaire sous la forme d’une « justice populaire » qui cherche des coupables et se veut plus efficace et plus politiquement « juste » que la Justice au point d’accentuer ses travers et de reconduire finalement le même système de pouvoir.

Mother – Projection reportée

Lundi 17 novembre – 19h30
Lundi 8 décembre – 19h30

Bong Joon Ho
2009 – 128’

Lorsqu’une jeune fille est assassinée dans une petite ville de Corée du Sud, Yoon Do-joon, un adolescent harcelé à cause de son handicap, est accusé et enfermé.
Commence alors, pour sa mère, une longue enquête pour trouver le meurtrier et tenter d’innocenter son fils, à tout prix. Le film qui emprunte au genre du « whodunnit » (« qui l’a fait ? ») suit les pérégrinations et les rencontres qu’elle dessine au sein d’une campagne étrange, véritable métonymie du pays. Un certain malaise s’immisce peu à peu et imprègne toutes les sphères de la société coréenne : policières, judiciaires, familiales. À travers des accents glauques et monstrueux, le film interroge, en filigrane, notre rapport à l’altérité, à la maladie et au déni.

Jusqu’où iront-ils pour plaire ?

Discussion sur la démagogie

Vendredi 7 novembre – 19h30

Aujourd’hui, d’Houria Bouteldja à LFI en passant par Frédéric Lordon, tout le spectre de la gauche populiste n’en pince que pour la question des « affects » (entendus comme bas-instincts, ou passions). Il faudrait trouver ce qui mobilise, qu’importe le rationnel, qu’importe si au final ce qu’on mobilise ce sont des « affects » de faf. Pour Lordon par exemple, l’idée est de concurrencer l’extrême-droite sur son terrain car cette dernière fait rêver et fantasmer, en utilisant justement ses affects. De là se dessine une obsession pour la « proposition pulsionnelle » du fascisme, les foules, les hooligans… et une critique d’un « matérialisme étriqué » qui ne prendrait pas en compte ces « pulsions » là.
Lordon par exemple propose alors un « matérialisme étendu » d’un « communisme intégral » qui s’attacherait à savoir comment mobiliser la nation, les racines, la religion …
Pour ce versant de la gauche, cela donne la défense de la nation française pour plaire aux natios, la défense du religieux pour draguer les croyants, la défense des racines pour draguer les « fâchés mais pas fachos », la défense du Frexit et de la sortie de l’euro pour plaire aux électeurs d’Asselineau et de Philippot peut-être et puis même pourquoi pas la race, l’endogamie et autres concentrés réactionnaires…
Et pourquoi pas ? Si « les foules » le veulent !
Ce mode de réflexion démagogique sur la question de la mobilisation des affects ou des pulsions des individus se retrouve malheureusement bien plus largement que dans cette sphère politique qui ne pue que le rance.
Elle s’est invitée de manière partielle dans les aires à prétention subversive. On voit souvent poindre textes, théories ou réflexions néo-léninistes centrés sur la massification, la propagande et la bataille culturelle ou la composition, indiquant qu’il ne faudrait pas aller à l’encontre de ce qui peut « fédérer » les gens, même si l’élément qui fédère à toujours été un ennemi de l’émancipation (comme le nationalisme au drapeau français, au discours crypto-conspirationniste sur les élites, à la religion, au sentiment communautaire, aux rapports pacifiés avec la gauche…)
A croire qu’il faudrait se demander ce qui « fonctionne » le plus, comme un marketeux de la Défense ou un directeur stratégie de campagne électorale, et se baser sur cela pour intervenir dans la réflexion théorique ou la pratique.
Dans les faits, cela donne une absence criante de critique antinationaliste ou antireligieuse et d’opposition à une gauche qui, si elle a toujours été affligeante, a bien fini sa mutation vers un populisme toujours plus abject.
Si nous sommes d’accord avec le constat qu’aujourd’hui, l’affirmation explicite des perspectives révolutionnaires semble battre de l’aile, il n’est pas question pour nous de nous demander ce qui «plaît » le plus, mais plutôt de faire vivre nos perspectives émancipatrices et conflictuelles.
S’il y a des désirs et des instincts vers lesquels il faut se tourner, ne serait-ce pas ceux qui visent à mettre à bas ce monde d’exploitation et de discipline plutôt que ceux qui le font tenir debout ?

Le règne animal

Lundi 3 novembre – 19h30

Thomas Cailley
2023 – 127’

Dans un futur proche, une épidémie d’étrangeté se répand à travers la population mondiale : les uns et les autres commencent à se transformer en animaux anthropomorphes, en en adoptant autant des traits physiques que des désirs et traits de caractère. Les Etats tentent de gérer ces mutations en utilisant les outils habituels du contrôle : fichage, surveillance, parquage et encampement… A certains égards, nous pouvons proposer ce film dans le cycle sur les kaijus : on voit le pouvoir mis à mal par un débordement qu’il échoue à endiguer. Mais au lieu de regarder de grandes villes et infrastructures dégommées par de grands monstres (ce qui est un des grands plaisirs du ciné-club des Fleurs Arctiques), c’est à travers la vie d’un père et de son fils adolescent partis dans le sud de la France que l’on assiste à cette belle fable cinématographique et lyrique sur une des fins possibles de l’humanité. La disparition de l’humanité par transformation en monstres tous irréductiblement singuliers, même pas catégorisables en nouvelles espèces animales ! Comme quand on regarde Mad Max, on se met à désirer l’apocalypse et la grande bascule dans un monde enfin autre. Le rapport au non-humain, à l’animal et au monstrueux sont ici traités avec une grande finesse et beaucoup de poésie, en même temps qu’Emile traverse toute l’étrangeté et la sauvagerie de l’adolescence. Le règne animal est aussi un grand film sur ce qui, dans l’adolescence, peut faire gripper la machine à normaliser qui, ici, se manifeste autant dans la police que dans la vie de village qui s’arme contre les mutants.