Docteur Folamour

Stanley Kubrick – 1964 – VOSTF (USA) – 95’

Lundi 28 juin à 19h

Ah, la bombe atomique… Comment ne pas l’aimer ? Surtout pendant la guerre froide ! Au fond, le problème avec la Bombe, c’est que tout le monde ne l’aime pas autant que le colonel Ripper. Il faut le comprendre aussi: Quand vous avez une base aérienne, des pilotes, des bombardiers B-52 promenant des bombes à hydrogène à toute heure du jour et de la nuit, il faut dire que ça démange. La dissuasion ? Mais la dissuasion c’est l’attaque! Lorsque le colonel apprend une surprenante conspiration, (les soviets auraient pour volonté de polluer les “fluides corporels américain” à la fluorine), c’est la goutte qui fait déborder le vase. Ripper sonne le branle bas de combat et se met à jouer des pieds et des mains avec un sens du double jeu digne de Machiavel afin de pouvoir (enfin) lâcher cette satanée bombe sur les rouges. Fort heureusement, un subordonné de Ripper, l’officier Mandrake, n’est pas dupe des machination de son supérieur et se met en devoir d’empêcher cette pulsion délirante. Dans ce film au pur style de Kubrick, le sérieux, l’absurde et la folie sont mêlés avec subtilité et les personnages, parfois caricaturaux, parfois sensiblement névrosés se retrouvent entraînés dans une danse macabre et apocalyptique vers, qui sait, la fin du monde ?

Puissance, impuissance et courage révolutionnaire

Vendredi 18 juin à 19h

 

Dans le cadre du cycle sur la violence, nous proposons de prendre ici les choses par un autre bout, peut-être plus individuel ou existentiel, mais pas seulement. Si dans notre contexte désactivé c’est un phénomène en recul, l’esthétisation et l’héroïsation des pratiques et des personnalités révolutionnaires reste un des écueils fondamentaux des mouvements révolutionnaires. Détruire les symboles, les mythes, les panthéons et les martyrs du pouvoir pour les remplacer par d’autres ne pourrait pourtant qu’insatisfaire quiconque penserait comme primordiale la part destructive et donc réellement disruptive du projet révolutionnaire. Aujourd’hui cette folklorisation1 de la violence révolutionnaire – pour mieux la conjurer – est l’œuvre des militants eux-mêmes, et on peut affirmer tranquillement qu’elle est proportionnelle à l’absence de pratiques révolutionnaires réellement tranchantes, auxquelles on préfère aujourd’hui un petit quotidien militant (réel ou virtuel, on peut désormais militer sur son smartphone) qui ne diffère en rien ou presque de celui du militant réformiste pépère, voire de la normalité de ce monde, puisque les beaux discours, les slogans très radicaux et les likes endiablés n’ont jamais fait tomber un seul mur ici-bas. Bien qu’une révolution des petits gestes sans violence soit un rêve qui embrasse volontiers le ridicule christique dans toute sa reddition, l’exercice de la violence dans des cadres pacifiés comme celui des démocraties actuelles2 ne s’en retrouve pas moins relégué à une antiquité, en tout cas, il passe pour beaucoup moins « naturel » qu’il pouvait y paraître dans des sociétés et des époques bien plus marquées par l’agitation, l’imaginaire et la violence révolutionnaires. Il faut désormais du courage (et sans doute un peu de ce que la norme appelle « folie ») pour entreprendre de se mettre en jeu dans l’attaque d’un monde où ne se trouve même plus le courage de blasphémer, de « blesser » ou d’indisposer nos oppresseurs, auto-réprimés que nous sommes par toutes sortes de nouvelles théories farfelues véhiculées par l’université et adoptées parfois jusqu’au sommet de l’État, et disculpant ainsi les responsables réels de ce monde ignoble pourtant dénoncé par les révolutionnaires depuis des siècles3 : le principe de l’État, l’idée de Dieu, de destin et de « Nature », le pouvoir et le Capitalisme. On préfère alors s’attaquer localement aux uns et aux autres dans la minutie des rapports sociaux et des comportements qu’ils entretiennent ensemble autour de soi, oubliant que nous sommes globalement plus de sept milliards d’individus (et plus encore de rapports) à réprimer et que le réformisme comme la répression sont des impasses fondamentalement contre-insurrectionnelles… On en viendrait à croire que pour se libérer, il suffirait de tuer un oppresseur, et donc de se tuer soi ou son voisin, puisque nous le serions tous. On sait pourtant déjà sur la question dite « écologique » que ce n’est pas en assainissant par la répression des mœurs ou la culpabilisation morale le « bilan carbone » de Jean-Pierre et Marie-Paulette de Livry Gargan qu’on sera en mesure de préserver la Terre des pollutions humaines, alors quoi ? Cette prédation morale, cabalistique et cannibalesque est à vrai dire effrayante, et bien tout le contraire de tout courage révolutionnaire. Il nous faut réorienter nos flèches vers le pouvoir. Il nous faut attaquer ce monde, ses fonctionnements, ses responsables et ses rouages – ils ont des noms et des adresses – plutôt que de compenser nos frustrations par la surveillance morale, le contrôle social diffus et la répression normative des autres individualités mutilées de ce monde, sinon nos mots sont à jamais creux et nos perspectives à jamais lâches, indifférentes et faibles. Une fois cela dit, il resterait à se contenter d’attendre la venue d’un surhumain messianique délivré de la peur d’agir et des enjeux mortifères de l’époque, et floqué d’un sens absolu du devoir et de l’abnégation, ou bien nousmêmes à affronter ce qui nous maintient enchaînés dans des représentations faibles et impotentes de nous-mêmes pour pouvoir attaquer ce monde de façon diffuse et permanente. Sans panache, sans espièglerie, sans férocité et sans courage (qui peuvent tout aussi bien être des caractéristiques individuelles que collectives), il semble vain de vouloir détruire ce monde. Comment les trouver, comment les retrouver ? Quelle est cette castration sociale et civilisée qui nous intime de ne pas rendre les coups, et qui la plupart du temps y parvient ? Comment comprendre et traverser la peur que l’hostilité de ce monde peut provoquer et qui n’est pas forcément si contradictoire que ça avec le courage, tout autant que la peur de ce que nous pourrions faire de notre liberté ? Comment tuer le gendarme dans nos têtes ? Comment hacker le logiciel des dispositifs stérilisateurs du Surmoi ? Comment permettre l’élévation du niveau de la violence révolutionnaire asymétrique sans se reposer sur la délégation circonscrite de la pratique à des « professionnels » de la chose, leur délégant également le courage pourtant nécessaire à tout bouleversement, personnel comme révolutionnaire ? La peur, le courage, la lâcheté, la violence, compagnons, camarades, discutons-en vraiment, en laissant les belles postures à l’entrée.

1 Voir par exemple le travail critique effectué à la bibliothèque contre le piètre documentaire « Ni dieu ni maître, une histoire de l’anarchisme » (de Tancrède Ramonet, Arte, 2016)

2 Dans lesquelles la violence se voit restreinte à un monopole exclusif, moral et physique des forces de l’ordre et de l’État (ainsi que le droit au port d’armes à feu et la permission de tuer), et dans un cadre privé de la famille, du groupe social et de la communauté, sous peine de sanctions parfois « violentes ».

3 Encore une preuve de l’incongruité des « lanceurs d’alerte », des logiques de « révélations », de « Callouting », du prosélytisme, des belles paroles et du « dévoilement », s’il en fallait.

Peut-il exister un milieu révolutionnaire ?

Vendredi 4 juin 19h

 «Ce que je veux, c’est que l’on soit un comité de boules. Qu’il n’y ait plus de distinction entre pétanque et Lyonnaise. Que le bureau soit composé de dix pétanqueurs et deux boulistes, ou l’inverse, peu importe. L’essentiel est d’avancer ensemble.» Jean-Claude Panos (président du comité de gestion du boulodrome départemental d’Auxerre), in L’Yonne Républicaine.

 

Parmi celles et ceux qui souhaitent voir la société mise à bas, la destruction de l’État et du Capital, les rapports sociaux que nous connaissons aujourd’hui bousculés dans leurs fondements, en bref la réalisation concrète de la possibilité révolutionnaire, existe un besoin sans doute fondamental et impérieux : celui de se donner la possibilité d’intervenir sans rester isolé, de construire de la puissance dans la conflictualité engagée contre l’apareil étatique et les défenseurs du maintien de ce monde. Cela pour endiguer l’isolement et l’atomisation que produit la société, qui empêchent toute possibilité de révolte, toute possibilité de développement d’une puissance révolutionnaire effective et dangereuse pour l’ordre établi. Cette aspiration nécessaire a trouvé diverses réponses plus ou moins subversives et émancipatrices, mais aussi plus ou moins auto-limitées et auto-limitantes (parfois jusqu’à des fonctionnements autoritaires), à travers les différentes théories révolutionnaires qui ont émergé dans l’histoire et qui sont d’une certaine manière des outils mis à notre disposition pour y répondre. On trouvera par exemple dans des pans plus autoritaires de l’histoire révolutionnaire la proposition simple, efficace et prête-à-porter, du Parti – qui a effectivement su liquider bien des épisodes révolutionnaires. Dans des sphères certainement plus minoritaires (mais semblerait-il sensiblement plus subversives) cette aspiration à intervenir aura trouvé des tentatives de réponse anti-hiérarchiques, comme la libre-association anarchiste des individus, ou encore l’auto-organisation autonome de ceux qui luttent. Ces propositions (qui ne sont que des exemples parmi d’autres) font évidemment sens les unes par rapport aux autres, certaines radicalement opposées entre elles, d’autres qui se posent en continuité, et il nous faut précisément nous interroger sur ces dernières afin de poursuivre l’hypothèse révolutionnaire, pour ne pas piétiner historiquement sur ces outils à notre disposition. Quoi qu’il en soit, toutes ces personnes qui se soucient un tant soit peu de la liberté se retrouvent de fait mises en rapports jusqu’à, et nous en arrivons au sujet principal de cette discussion, former (peut-être – ou non – malgré elles) un « milieu » : une micro-société restreinte et codifiée, bien propre au monde que nous connaissons, comme il pourrait en exister un dans la Bande Dessinée, ou comme les scènes musicales par exemple. Ceci doit nous poser question, si nous tenons à ce que les révolutionnaires ne soient pas organisés ou associés comme pourraient l’être les boulistes du boulodrome d’Auxerre, par exemple. Ce « milieu révolutionnaire » (sur lequel trop de guillemets devraient être mis pour la bonne lisibilité de ce texte) parfois revendiqué et assumé par une proposition dite « milieutiste », en tant que formation sociale non-extérieure à ce monde endosse les mêmes objectifs que tous les autres milieux, ceux de sa propre reproduction et sauvegarde, avec sa propre existence comme projectualité ultime. Ceci logiquement selon les besoins de l’époque et de la période, et donc peut-être intrinsèquement au détriment des tentatives subversives qui s’expriment en refus de cette dite période. En formant une espèce de clan, de tribu « révolutionnaire », auto-centrée et refermée sur ses codes et sa morale, le fond et la perspective d’en finir avec l’existant risque de fort de passer à la trappe au profit de la survie de soi, du groupe. Mais cette perspective peut-elle sérieusement être souhaitable ? Ne devrait-elle pas poser question par rapport à tout un ensemble de concepts qui appartiennent profondément à ce que « nous » combattons, comme le carriérisme, la réussite sociale et/ou politicienne ? Comme rien d’acceptable n’est trouvable dans aucun manuel politique et révolutionnaire, il faut que nous nous posions sérieusement, pour toutes celles ceux que ce questionnement libertaire concerne, la question de comment nous organiser sans reproduire entre nous les fonctionnements autoritaires anti-subversifs que nous cherchons avec tant de cœur à abattre dans la société. Réfléchir à cette notion de « milieu » devrait aussi nous amener à nous poser la question (qui ne date pas d’hier) qui est celle de l’ouverture des idées révolutionnaires vers l’ailleurs, l’autre que soi et ses copains, question à laquelle une fois de plus nombre de réponses ne peuvent que nous insatisfaire, comme l’établissement maoïste, le populisme ou le paternalisme. Retrouvons-nous donc pour en discuter, non sans oublier aussi que, peut-être, ne peut exister de révolutionnaires sans Révolution…

Appel à solidarité pour les suites de l’affaire dite « machine à expulser » : ne laissons personne seul face à la répression !

A partir de novembre 2008, en France, après l’incendie qui a réduit en cendre le centre de rétention de Vincennes au cours d’une révolte des sans papiers qui y étaient enfermés, la lutte contre les frontières et l’enfermement des sans-papiers a connu une phase particulièrement offensive, avec un grand nombre d’attaques, en particulier contre des entreprises collaborant à la machine à expulser, comme les banques dénonçant les sans papiers aux flics ou les entreprises de transport participants aux expulsions. La répression de ce moment de lutte a conduit des dizaines de militants sous le coup d’une procédure tentaculaire, avec des perquisitions à répétitions, plusieurs incarcérations en préventive et une pression et une surveillance policière qui ont duré presque une décennie. L’instruction, qui était surtout là pour donner à la police et au renseignement les coudées franches en terme de contrôle et de surveillance de la large mouvance alors active sur ces questions, a été maintenue en cours au delà de tout délai « raisonnable », jusqu’à ce qu’elle finisse par se clore en 2016 sur la mise en accusation dans deux procès d’une dizaine de personnes, tous pour des délits très mineurs, (certains même seulement pour avoir refusé de donner leur ADN lors des interpellations), les faits les plus criminalisables, qui avaient justifié l’instruction, étant finalement tous déclarés « sans auteurs ». Dans le premier volet de cette affaire, parce qu’il est très rare que la justice se dédise complètement, ce sont en fin de procédure du sursis ou des amendes pour tag, dégradations mineures, ou refus de se soumettre à la signalétique qui finiront par être attribuées aux mis en examens, alors que plusieurs personnes ont été incarcérées plusieurs mois en préventive dans cette affaire.

Aujourd’hui, dix ans plus tard, alors que les procès en appels sont clos, ceux qui sont passés en procès doivent faire face aux frais occasionnés. L’un d’entre eux au moins, à notre connaissance actuelle, risque une saisie de ses faibles revenus. Exprimer une solidarité active, par tous moyens, au delà de l’étirement du temps de la machine judiciaire qui s’efforce de broyer la vie de ceux qui se retrouvent pris dan ses rouages, nous semble primordial, ainsi que poursuivre la lutte contre toutes les frontières, toutes les prisons et contre le monde qui les produit.

Ne laissons personne seul face aux conséquences même tardives de la répression ! Tous ceux qui souhaiteraient participer à cette solidarité peuvent nous écrire, que ce soit en organisant des initiatives selon leurs possibilités, par exemple des discussions autour de ce moment de la lutte contre les frontières, qui peuvent s’appuyer sur la brochure Le vaisseau des morts a brûlé, écrite à l’occasion du premier procès, qui s’efforce d’en retracer assez largement le déroulement, ou en envoyant de l’argent pour aider à faire face aux suites judiciaires.

Si d’autres inculpés veulent se joindre à l’initiative, qu’ils n’hésitent pas à nous contacter.

Solidarité avec les inculpés de la machine à expulser !

Feu aux prisons, aux frontières et aux centres de rétention !

Liberté pour tous, avec ou sans papiers !

Le 05 mai 2021

pafledab

Contact : pafledab@canaglie.net

Cecil B. Demented

John Waters – 2000 VOSTF (USA) – 87’

Lundi 31 mai à 19h

Un cinéaste underground à la tête d’un groupe armé de tournage fanatisé pousse la radicalité au-delà des limites de la fiction en enlevant une star hollywoodienne en vogue dans le cinéma mainstream pour lui faire tourner sous la contrainte un film fait de scènes d’attaques de tournages de blockbusters. Sur le modèle de Patty Hearst qui finira par rejoindre ses ravisseurs, la star se prendra au jeu et deviendra la vedette de ces interventions cinématographiques armées.

John Waters retrouve au début des années 2000, quelque chose d’une subversion très punk pour nous faire assister au tournage rocambolesque et burlesque de ce film expérimental ultime qui représenterait l’absolue radicalité d’un cinéma intervenant contre lui-même sous la houlette d’un auteur déjanté et chef absolu de sa révolution cinématographique totale. Alors que le jeu spéculaire de cette mise en abîme pourrait aboutir sur un cynisme tournant en dérision à la fois la révolution et le cinéma, le traitement grotesque de cette praxis révolutionnaire fanatique qui fait du cinéma son champ de bataille prend une tournure singulièrement subversive et assurément drôle et jouissive. Les oppositions très intellectualisantes entre cinéma d’auteur et blockbuster, ou entre artifice et réalité se retrouvent dynamitées, toutes les prétentions autoritaires à s’instituer en chef suprême de la subversion se retrouvent ridiculisées, et dans un retournement absurde, c’est finalement le genre et la déviance qui triomphent de l’auteur et de toutes les normalités.

En plus du plaisir de voir ce film ensemble, on voudrait commencer à évoquer, à travers ce ciné-club burlesque, la très sérieuse question des rapports entre art et révolution, histoire d’essayer d’éviter qu’elle se noie comme c’est si souvent le cas dans des faux-semblants théoriques qui finissent par ne plus rien avoir à voir ni avec l’une ni avec l’autre.

 » Et le reste du film s’appellera cinéma-vérité

et sera tourné avec de la vraie terreur ! « 

Bonheur et Liberté

Vendredi 28 mai à 19h

«Selon moi, ce sont des chamailleries de cour de récréation. Je ne veux pas que ça dégénère, ça me ferait trop mal au cœur. Les deux entités peuvent cohabiter.» Jean-Louis Baudet, secrétaire du comité bouliste départemental de l’Yonne

L’injonction au bonheur est incontestablement l’un des piliers de la démocratie capitaliste qui nous gouverne. Heureux au travail, heureux dans le mariage, heureux dans la famille, heureux dans la paix sociale. La où les révolutionnaires de toutes sortes n’acceptent pas les présupposés de ce monde, le bonheur capitaliste ne devrait pas y échapper.

Pourtant, la tension vers l’émancipation de toutes et tous, vers la liberté, semble être largement perçue comme un synonyme immédiat de bonheur et de joie. Mais cela n’est-il pas en réalité relativement contradictoire avec la lutte sans concessions contre l’Etat ? Dans les faits, contester l’existant et tenter d’en ébranler les fondements n’est pas toujours « plaisant ». Le risque de la prison, de la précarité et de l’isolement social sont autant de choses qui se chargent de rendre difficile et souffrante l’activité à prétention subversive. Si jamais la perspective ultime que nous retrouvons à porter deviens notre propre bonheur et le contentement des individus, ne risquons nous pas de perdre au passage de notre subversivité face aux difficultés matérielles et émotionnelles qu’implique la mise en pratique de l’idée révolutionnaire ? Par ailleurs, gardons à l’esprit que les géants de ce monde s’organisent déjà pour nous rendre heureux et pacifiés. Elon Musk et sa société Neuralink, par exemple, développent aujourd’hui des puces électroniques reliées aux neurones de singes, destinées à rayer de l’être humain toute espèce de « dysfonctionnement mental » comme la dépression, l’angoisse ou même l’autisme (sic). Une utopie fondamentalement répressive, ou tout le monde est heureux dans le meilleur des mondes capitalistes. Si jamais nous en venions à un tel stade d’aliénation que nous reproduisions cette injonction au bonheur et à la paix dans nos quotidiens, dans nos entre-sois bien organisés, ne serions nous pas entrain d’aller dans une impasse, à tenter de subvertir le monde en en acceptant les présupposés les plus fondamentaux ? Et si le bonheur devient la préoccupation permanente, qu’adviendra-t-il des souffrants, des déséquilibrés, des pessimistes, des malheureux, de tout ceux qui viendraient entacher la joie et le plaisir des joyeux révolutionnaires ? Dans cette époque postmoderne ou le contentement des individus prévaut à l’espoir révolutionnaire, ou le retranchement sur soi et sur celles et ceux qui nous ressemblent se généralise, la défense du conflit, du sérieux et de l’insatisfaction semble importante. Il est aussi important d’avoir à l’esprit que l’on peut bien évidemment trouver un versant opposé à cette course au bonheur, car tout les gauchismes se reconnaissent et s’alimentent. L’injonction au malheur, la vertu du mal-être, le refus de soigner ce qui fait souffrir, autant de perspectives désespérées et désespérantes que certainement nous ne voudrions pas voir généralisées et diffusées dans nos aires à prétention subversives.

Entre nihilismes désespérés et utopismes libéraux, entre fanatisme guerrier et désintérêt frivole, il faudra bien trouver un passage pour la révolte et l’espoir, pour que soient dépassés nos utopismes et nos nihilismes, pour la Révolution. C’est dans ce sens que nous proposons de réfléchir, avec une question qui pourrait se résumer comme ceci : La recherche du bonheur peut-elle être prise comme une perspective révolutionnaire ?

le cadenas de son vélo était dans sa poche… suivi de Fichtre ! La fiche secrète est fichue !

E a été arrêté lors d’un contrôle préventif aux abords de la contre-manifestation du 20 février en opposition à Génération Identitaire. Et pour cause, il avait dans sa poche…son cadenas de vélo, que les flics, les juges et la procureure se sont entêtés à nommer « chaîne de vélo » et qui a été détruit à la fin de la procédure pour son caractère « dangereux et illicite ». Le motif d’interpellation est « port d’arme prohibé », et pendant la garde à vue, le chef d’accusation devient «participation à un groupement, en vue de la préparation de violences volontaires contre les personnes ou de destruction ou dégradation de biens », auquel s’ajoute le refus d’empreintes.
Lors de la comparution immédiate, la juge a cru bon de considérer que l’absence d’empreintes est une raison suffisante pour le nommer obsessionnellement « X se disant E » malgré son passeport biométrique, et pour l’envoyer en détention à Fleury, où il passera 10 jours, puisque suite au reversement de ses empreintes depuis les fichiers de la prison, il a été libéré lors de la première demande de mise en liberté.
Le fond de l’affaire a donc été jugé le 29 mars. Après que la proc nous a aimablement rappelé que lorsque qu’on choisit de vivre en société, on a des droits ET des devoirs, « sinon c’est l’anarchie », E. a refusé de répondre aux questions du juge puis a repris la parole pour déclarer :
« Arrêtons de raconter n’importe quoi, vous avez un nombre de policiers et de caméras effarant, vous avez développé la reconnaissance faciale, vous avez mon passeport biométrique, vous avez pris mes empreintes en prison, vous m’avez fiché : vous savez qui je suis. Par ailleurs votre justice m’a déjà puni, vous m’avez fait passer dix jours à Fleury-Mérogis. Ma fiche S va me suivre et me faire chier pendant encore longtemps. Mais tout ça n’est pas bien grave parce que pendant que nous parlons, à Bristol comme ailleurs dans le monde, ça brûle. Vous pouvez taper autant que vous voulez avec votre petit marteau sur votre bureau, vous pouvez continuer à envoyer des gens en prisons tout la journée comme vous l’avez fait aujourd’hui, ça n’y changera rien. Pour finir, mes intentions ne vous regardent pas, elles pourraient être de brûler toutes les prisons du monde ou de me faire un délicieux café, elles ne vous regardent pas. »
La procureure, qui assume le fait que la préventive a déjà été une forme de punition, ne requiert « que » 140 h de TIG avec 3 mois de prison s’il ne sont pas effectués. Le juge, qui ne manque pas d’humour – il vient d’envoyer 9 mois en prison un jeune majeur handicapé mis à la rue par l’ASE qui cherchait un endroit pour dormir et qui s’est fait défoncer par un citoyen-vigile – précise à E qu’il peut refuser les TIG, (ce qu’il fera évidemment), parce que « le travail forcé est interdit en France ».
Le délibéré laisse sans voix : le juge abandonne de sa propre initiative les charges initiales (groupement et refus d’empreintes), désavouant ainsi complètement le travail de la proc et des flics, et leur substitue un « port d’arme de catégorie D », en l’espèce un cadenas de vélo, pour lequel il attribue à E., quand même, 3 mois avec sursis. Dans cette logique toute judiciaire, donc, si E. se fait contrôler un cadenas de vélo en poche en sortant de chez lui, son sursis pourrait être révoqué…
Nous nous faisons un plaisir de faire appel à partir de cette incrimination absurde : à suivre, donc !

FICHTRE ! LA FICHE SECRÈTE EST FICHUE !

Au cours de l’audience, l’avocat a pu souligner à quel point il s’agissait d’une procédure bien plus policière que judiciaire. En effet, une pièce « sensible » avait été transmise au juge par mail et nous avions décidé que la demande serait faite qu’elle soit versée au dossier. Le juge s’est donc vu contraint de lire la fiche S de E. en audience, puisqu’elle faisait partie intégrante des pièces du dossier, avec l’air dégoûté de celui qui se salit les mains avec des relents de bruits de fond de couloirs de commissariat, et tout en affirmant que la justice ne devait pas en tenir compte.
E a donc appris à cette occasion qu’il était fiché depuis le 26 novembre 2020 en tant que « militant de la mouvance contestataire radicale susceptible de se livrer à des violences » et, comble du ridicule vu la situation, s’est entendu lire qu’il devait  : « ne pas être avisé de l’existence de la présente fiche ».
Le caractère policier de ce procès qu’on pourrait dire « de renseignement » s’est aussi traduit par une pression policière minable, à la limite du harcèlement, par les flics du tribunal : contrôle d’identité pour non port du masque à des personnes qui en portaient un, E. menacé d’une amende pour avoir jeté son mégot par terre, appuyé d’un « on t’attend à la sortie »…
Déjà à la DML, pour quelques stickers collés dans le tribunal, les flics avaient forcé deux personnes à se placer devant des caméras pour être comparés par vidéo aux images qu’ils croyaient détenir du suspect des collages intempestifs.

Rendre les plus publiques possibles ces formes de fichages faites pour intimider et mettre la pression dans les couloirs des comicos et des tribunaux, comme nous le faisons ici, nous semble primordial.
A chaque occasion, faisons en sorte que les fiches « Secrètes » soient versées aux dossiers et rendues publiques !

Continuons à refuser notre propre fichage !

Nos intentions nous regardent mais leurs fiches regardent tout le monde !

Feu aux prisons et aux tribunaux !

Camarades et compagnons solidaires de E.
contact : mothrarising@riseup.net

Cliquer ici pour télécharger le tract A4 recto verso

 

Refusons de participer à notre propre fichage ! Appel à une présence solidaire au procès d’E le 29 mars à 13h30

Le 29 mars se tiendra le procès d’E arrêté le 20 février après un contrôle de police à Montparnasse où se déroulait une contre-manifestation s’opposant au rassemblement de l’organisation raciste et racialiste Génération Identitaire. Suite à cette interpellation, il a été placé en garde à vue pour « groupement en vue de » caractérisé par un « port d’arme par destination », à savoir, un cadenas de vélo (qui, parce que décrit comme « illicite, dangereux ou nuisible », a été détruit plus tard dans la procédure).

E a ensuite été déféré pour une comparution immédiate(ment)refusée. Juge et procureur se sont alors très rapidement accordés sur le fait qu’on ne pouvait absolument pas être sûr de qui pouvait bien être E, car ce dernier avait refusé de donner ses empreintes lors de la garde à vue et au dépôt. Bien qu’il ait fourni son passeport, son identité à été établie comme « invérifiable », ce qui est apparemment très embêtant, il a d’ailleurs été obsessionnellement désigné par « X se nommant… » pendant le procès, et a été placé en détention provisoire, avec la mise en place d’’une commission rogatoire pour récupérer ses empreintes en prison. Une demande de mise en liberté a donc été déposée et jugée le 3 mars, après que E a passé 10 jours en prison à la maison d’arrêt de Fleury Mérogis. Les empreintes prises pour le fichier interne de la prison ont été transférées au dossier judiciaire, par le biais de la commission rogatoire, procédé de plus en plus courant, le plus souvent en la défaveur des prévenus, mais qui, cette-fois là, a joué dans le sens de sa libération. Il a donc été libéré sous contrôle judiciaire avec l’obligation de pointer une fois par semaine et l’interdiction de manifester, malgré la réquisition du procureur, hargneux, qui réclamait le paiement de 500 euros de caution pour sanctionner sa mauvaise tenue lors de l’audience, sous prétexte qu’il a montré de l’agacement face aux questions inquisitrices du tribunal, et signifié qu’il n’y répondrait pas.

On a hâte de voir, lors du procès au fond, comment sera étayée cette transformation désormais habituelle des « intentions » supposées en délit, à un double niveau cette fois, puisque, arrêté seul lors d’un contrôle préventif, on peut traduire ce qui lui est reproché, en plus de refus d’empreintes, comme « l’intention de participer à un groupement dans l’intention de commettre… ». Mais c’est vrai qu’il avait un cadenas de vélo dans sa poche… et ça, ça montre clairement qu’il avait l’intention d’avoir l’intention de faire des trucs sûrement gravement répréhensibles !

En tous les cas, il est clair que le refus d’empreinte a été présenté comme devant conduire systématiquement à la détention provisoire. Cette mauvaise pratique risquant de devenir une habitude, il est important de réagir collectivement face à la tentative de normalisation des incarcérations pour refus de signalétique. Une discussion a déjà eu lieu à ce sujet le 6 mars dernier au Marbré (Montreuil).

Multiplions les initiatives autour de cette question et retrouvons-nous au TGI (place de Clichy) chambre 23/2, le 29 mars à 13h30, pour le procès des intentions de E.

Refusons de participer à notre propre fichage !

Nos intentions nous regardent !

Liberté pour tous et toutes !

Feu à toutes les prisons !

Défendons-le / Attaquons-les !

Camarades et compagnons solidaires de E.

contact : mothrarising(at)riseup.net

 

Aux Fleurs Arctiques en mars et avril 2021

La bibliothèque des Fleurs Arctiques rouvre ses portes à raison d’une permanence tous les mercredis de 15h à 17h30 à partir du 17 mars, pendant lesquelles nous travaillerons entre autre sur la réalisation de nouvelles Feuilles Antarctiques, et d’un groupe de lecture tous les dimanches à 15h30 à partir du 14 mars, où nous continuerons à lire ensemble la brochure L’Autonomie, le mouvement autonome en Italie et en France (1977) une semaine sur deux, l’autre semaine étant consacrée à la lecture de textes plus courts en lien avec les Feuilles Antarctiques en cours de production. Pour la première d’entre elles, nous travaillerons sur la question de la signalétique et de ses refus.

Nous mettons en route également un projet sur un temps plus long autour des réactions aux attentats. Après les multiples annulations de la discussion « Attentats et Réaction » dues aux aléas de la diffusion du virus, et parce que la situation épidémique est plutôt en cours d’aggravation avec les mesures de restrictions qui s’ensuivront sans doute, nous réfléchissons à d’autres manières d’encourager une réflexion ouverte, large et contradictoire sur ce sujet qui nous semble particulièrement important (mais cette analyse est-elle partagée ? voilà déjà un premier point qui mérite d’être débattu…). Il s’agirait de réaliser des entretiens variés autour de la question, permettant d’initier des dialogues « à distance » à travers l’écrit, le son, la vidéo, et tous les moyens qu’on pourra se donner pour le faire. Ce projet d’un travail collectif ouvert est en cours d’élaboration et tous ceux qu’il intéresse sont les bienvenus pour y participer et chercher ensemble des moyens de ne pas se laisser isoler et ensevelir dans le silence glaçant et le piétinement morose de l’époque. Il faut retrouver des moyens de débattre, de confronter les points de vues, de garder vivante la perspective d’affronter ensemble ce monde et ses difficultés grandissantes.

Tous ceux qui voudraient participer à cette élaboration et trouver des manières de diffuser des avis, des questionnements et de débattre ouvertement et largement malgré les couvre-feux et confinements de la période sont les bienvenus et peuvent nous contacter par mail ou passer à une de nos permanences. De nouvelles questions se posent à nous, ce n’est pas le moment d’accepter de cesser d’élaborer ensemble, dans la rage, la joie et l’enthousiasme, de quoi trouver de la puissance pour se confronter à ce monde.
Pour ceux qui voudraient savoir d’où on part, l’appel à discussion sur la question est disponible ici : https://lesfleursarctiques.noblogs.org/?p=1851. Être de bout en bout d’accord avec ce texte n’est absolument pas un prérequis pour participer à cette initiative, et les entretiens qu’on voudrait mener peuvent évidemment comporter des débats et discussions contradictoires avec ce point de départ.

Incarcération d’E. suite à la manif contre Génération Identitaire

Du refus d’empreinte à la préventive…

La discussion publique appelée dans ce tract, prévue initialement le 27 février au Marbré, a été empêchée de fait par la tentative d’expulsion du lieu par les flics et le proprio. Le lieu a été repris et elle pourra donc se tenir : 

samedi 6 mars à 16h,

au Marbré, 32  rue des deux Communes à Montreuil

Entre temps, la première demande de mise en liberté de E. a permis sa libération (avec obligation de pointer et interdiction de manifester). C’est le reversement de ses empreintes par commission rogatoire du fichier de la prison au dossier qui s’est retrouvé décisif puisque le refus d’empreinte était le seul motif de l’incarcération. Face à ce chantage à l’incarcération visant à obtenir que nous participions à notre propre fichage, il est urgent de se réunir pour discuter du refus de signalétique, ainsi que, plus largement du refus de toutes les formes de chantages répressifs.

 

Samedi 20 février dernier, à Paris, une contre-manifestation était organisée pour s’opposer à la manif des fachos de Génération Identitaire. Ces racistes de merde ont pu faire leur baroud d’honneur avec sono, discours, médias & compagnie, tandis que la contre-manifestation elle, était empêchée, notamment par le biais de fouilles et de contrôles préventifs aux abords de la manif.Un de ces contrôles a eu lieu place du 18 juin 1940 à Montparnasse avant la manif qui n’a pas pu avoir lieu, elle. Les flics trouvent dans la poche d’E. un cadenas de vélo et sa clef, et décident tout naturellement de l’embraquer pour « port d’arme par destination » et « groupement en vue de commettre… », placé en garde à vue au commissariat du Ve, il est prolongé puis déferré après 48h pour passer en comparution immédiate au TGI de Paris pour les chefs d’inculpation précédents et le refus de fichage.

A l’audience, E. refuse la comparution immédiate et l’absence de fond n’est donc pas traitée, cette sale proc’ de proc’ demande alors le placement en détention sous prétexte qu’en l’absence d’empreintes digitales à comparer avec celles inscrites au FNAEG, on ne pourrait pas produire la certitude qu’il correspond bien à sa pièce d’identité, qu’il avait pourtant fournie. L’audience a donc exclusivement tourné autour de la question de comment réprimer le refus de signalétique et la sentence est venue confirmer la position militante de la proc’ et des juges en la matière, en prononçant l’incarcération automatique en dépit des garanties de représentation (qui habituellement sont prises en considération dans les procès sur la question de la mise ou non en détention) avec commission rogatoire pour prélever les empreintes.

Même jour, même audience, un fasciste belge passionné de forge de l’autre côté de la manif passait en procès (défendu par un avocat tenant à affirmer son appartenance de gauche et dont la plaidoirie consistait à dire que les échauffourées n’avaient été causées que par les antifas…). Lui, a fourni toute sa signalétique et était en possession de deux balles de 9 mm (une percutée, l’autre non) ainsi que des cartouches de masque à gaz et des fumigènes, et se présentant comme membre de l’organisation « Amis et Boucliers » (!?). Même salle, deux ambiances (2 mois avec sursis et aucune chicanerie militante dans le réquisitoire et les questions de la juge…). On ne souhaite la prison à personne et même pas à nos pires ennemis mais il était clair qu’un cadenas de vélo mettait une bien plus mauvaise ambiance que deux balles, pour ces juges, aujourd’hui. A l’issue de l’audience, cette sale juge de juge a prononcé contre E. un mandat de dépôt sous les cris de rage d’un public peu nombreux mais solidaire.

Il est primordial de réagir face à cette tentative de normaliser l’incarcération pour les refus de signalétique. En solidarité avec E. et tous les inculpés de cette manifestation, contre la préventive systématique lors des refus de signalétique, soyons nombreux :

Mercredi 3 mars 2021 à 13h30,

au TGI de Paris, chambre 23/2  pour l’audience de demande de mise en liberté

Refusons de participer à notre propre fichage !

Liberté pour tous et toutes !

Feu à toutes les prisons !

Défendons-le / Attaquons-les !

Camarades et compagnons solidaires de E.contact : mothrarising@riseup.net