Anarchisme à la découpe : vous en reprendrez bien une tranche ?

A propos du documentaire Ni Dieu Ni maître, une histoire de l’anarchisme (Tancrède Ramonet, 2017)

Samedi 23 février 18h

Dans le cadre d’une réflexion au long cours que nous menons autour de la question des formes diverses que prend aujourd’hui la liquidation de l’héritage révolutionnaire (une manière d’essayer de comprendre par le haut, pour enfin en sortir, le désastre auquel la postmodernité nous condamne), nous poursuivons la déconstruction du documentaire Ni Dieu Ni maître de Tancrède Ramonet diffusé en avril 2017 sur Arte. En effet, cette mise au pas de l’anarchisme sous le regard de l’historiographie stalinienne, sobrement sous-titrée « Histoire de l’anarchisme » nous semble être un symptôme, mais aussi une des étapes, de cette liquidation. Au-delà des approximations, voire des contre-vérités historiques que ce documentaire véhicule, il s’agit de trouver une légitimation à ce courant révolutionnaire aux yeux du téléspectateur moyen, de la ménagère de moins de 50 ans, en somme, de le réhabiliter, en réécrivant une légende faite de héros et de martyrs, dans laquelle les épisodes de révoltes ou d’insurrections ne sont qu’une réponse « proportionnée » donc « excusable » aux attaques de l’État et du capital, qu’il faut comprendre au nom de ce que l’anarchisme a pu apporter de « constructif » pour ce monde. Dans cette réinterprétation lénifiante, ceux qui ont pu réellement vouloir le détruire, ce monde, ne sont plus que des fous dangereux, auquel on réserve une larme romantique et un peu de fantasme.
Nous avons déjà proposé deux moments de réflexion autour de cette question, le premier le 7 janvier dernier au cours duquel nous avons présenté et discuté la lecture critique que nous en faisons, le second le 5 mai en nous attachant plus précisément au traitement qu’il réserve à l’épisode de Haymarket Square (à Chicago en 1886).
Reprendre ce fil-là aujourd’hui, pour clarifier ce que cette lecture fait aux perspectives révolutionnaires qui ont vécu, c’est aussi pour nous un moyen de retrouver le fil de ces pratiques subversives, de détruire le mausolée dans lequel cette historiographie télévisuelle du dimanche après-midi (façon Michel Drucker) cherche à les enfermer, pour retrouver ce qu’elles peuvent apporter de vivant à notre triste présent. Comme les précédentes discussions, il s’agira plutôt d’une séance de travail ouverte et publique, appuyée sur le visionnage d’extraits du documentaire.