Solidarité avec le camarade incarcéré en détention provisoire

L’audience de la demande de mise en liberté aura lieu lundi 13 février à 13h30 au TGI de Paris

A bas la justice !

Solidarité avec ceux et celles sur lesquels elle s’abat

Une trentaine de personnes ont été arrêtées lors de la manifestation massive du 31 janvier, malheureusement trop calme dans l’ensemble malgré quelques affrontements avec les flics et quelques casses. Une grande partie des interpellés ont vu leurs GAV prolongées et il y a eu plusieurs déferrements les 2 et 3 février ; des amendes ont plu (mises directement par le Procureur grâce au nouveau dispositif qui le lui permet) ; deux arrêtés sont passés en comparution immédiate et ont refusé d’être jugés le jour même. L’un des deux, arrêté pendant la manifestation un peu avant Montparnasse au cours d’une charge policière, avait pour chef d’inculpation « jet de projectile sur PDAP sans ITT » (attention ! masqué par un FFP2 !). Alors que ses empreintes avaient été prises de force à coups de taser en garde-à-vue et qu’il n’y avait donc aucun doute sur son identité le juge a appliqué la demande du proc : détention provisoire, en l’attente de son procès le 10 mars… « Pour éviter toute récidive, au vu du calendrier des mobilisations ».

Encore une fois, la répression fonctionne de manière pro-active en s’attaquant à des intentions présumées. Ces dernières années c’était par des interdictions administratives que les présumés militants se voyaient interdire de participer aux manifestations. Là c’est encore mieux et c’est énoncé comme tel par le juge : en taule le temps du mouvement ! Encore une fois, nous récidivons dans notre haine d’une justice qui n’hésite pas à aller faire enfermer toute révolte. Une fois de plus l’institution judiciaire s’est ridiculisée en un spectacle immonde. Le juge Coquio, président de la séance, s’est non seulement montré condescendant et abject – soit le minimum prérequis pour exercer sa fonction – mais il s’est permis de faire taire l’avocate qui rappelait que les empreintes avaient été extorquées à coup de taser sous prétexte que : « c’est gênant… ». Oui, c’est gênant de dire en public que l’on a régulièrement recours à la torture pour soumettre des individus. Oui, c’est gênant de confronter ces petits bourgeois en robe noire à la réalité de la violence qu’ils perpétuent et assènent au quotidien. Bien pire que gênant, c’est à vomir. C’est gênant de voir tous les élèves du président de séance prendre des notes (car cette audience était « pédagogique », et suivi par des étudiants en jugement admiratifs de leur maître) sur comment le juge envoie, en bon Retour ligne automatique
de l’ordre, les inculpés faire de la taule, c’est gênant de les voir demander le silence, et se comporter eux-mêmes en matons. Mais cette nausée, M. Coquio la balaye d’un revers de main, avec une rhétorique digne d’un adolescent de 14 ans, et envoie en prison en préventive un adulte comme on sermonne un enfant.

Liberté pour tous !

Changement de programme

Apéro discussion autour du mouvement en cours vendredi prochain à 19h30

La discussion intitulée « la déconstruction du judiciarisme, ça commence quand ? » initialement prévue vendredi 3 février aura finalement lieu vendredi 17 février à 19h30. Elle laisse la place (vendredi 5 février à 19h30) à un apéro-discussion autour du mouvement en cours et des diverses initiatives qui pourraient y être prises. Ce sera aussi un moment pour que tous ceux qui se posent des questions autour de notre projet puissent venir en discuter de vive voix.

Signal, auto-défense numérique et organisation

Vendredi 20 janvier 19h30

Depuis maintenant quelques années, les milieux militants entre autres se sont saisis d’un nouvel « outil » considéré comme idéal pour résoudre des problèmes (éternels) de communication et de sécurité : « Signal ». Il s’agit d’une application sur téléphone permettant d’envoyer des messages, de faire des conversations de groupes tout en ayant un chiffrage du contenu envoyé. Le recours à cette application s’est notamment vu diffusé à travers diverses formations et brochures sur le thème de l’auto-défense numérique et s’est répandu comme une traînée de poudre dans les aires subversives, devenant aujourd’hui une quai obligation si l’on veut se mettre en lien avec des individus ou des groupes, ou participer à la plupart des initiatives.
Plutôt que de forger notre connaissance par l’expérience et par la lutte, les formations militantes sur l’auto-défense donnent un cours (qui, comme tout cours ayant trait à la surveillance et à la répression, aura toujours un caractère péremptoire et discutable par-rapport à la réalité des transformations des techniques policières), et peu de mauvais élèves se manifestent pour remettre en question un contenu qui devient une doxa de moins en moins discutable. Ne pas avoir installé Signal semble aujourd’hui aberrant lorsque l’on s’organise et l’application est vendue comme un « must have », un indispensable à l’organisation.
Pourtant comme n’importe quel outil technique qui prend ce genre de place et d’importance, depuis le temps que cet usage se diffuse, on peut remarquer qu’il induit le développement de formes d’organisations spécifiques, qu’on ne remet pas en question puisqu’elles émanent de la neutralité d’un outil qui semble adéquat et protecteur et s ‘impose comme nécessaire.
Tout ou presque passe par signal, allant même parfois jusqu’à remplacer les assemblées de luttes. Signal est devenu une sorte de réseau social militant, aux conversations pullulantes avec on-ne-sait-qui dedans… mais à coup sur des flics. Les sujets des luttes en cours sont discutés par Signal et les critiques virulentes ou les débats animés sont remplacés par des pouces sous des messages, un niveau encore en dessous des gauchistes mimant ainsi font les petites marionnettes pour approuver la parole de quelqu’un en assemblée. Mais c’est également l’information qui y circule ; les rendez-vous et réunions publics ou privés (cette distinction tendant dans cet usage de Signal à se confondre) disparaissent au profit de boucles Signal ; il devient préférable de s’envoyer des messages plutôt que de se confronter et de réfléchir ensemble si bien que par exemple certaines personnes qui donnent leur avis dans des groupes se permettent par exemple d’infléchir l’écriture d’un tract tout en n’ayant rien à voir avec la décision de l’écrire, ou en en comprenant pas le sens, voire en s’y opposant. On trouve le même genre de phénomène que dans les assemblées qui font voter bloqueurs et antibloqueurs pour prolonger ou nom l’occupation d’une fac : un démocratisme complètement idéologique vient remplacer et saboter l’auto-organisation. De plus le fonctionnement de cette application permet que des boucles plus restreintes se comportant de fait comme des bureaux politiques décident de ce qui sera diffusé dans des boucles plus larges, reproduisant les pires fonctionnement autoritaires sans aucun garde fou et avec l’alibi pratique de la sécurité et de l’efficacité.
Il est grand temps de réintérroger tout ce que charrient comme pratiques signal et plus largement les outils numériques et réseaux sociaux ! A quels besoins répondent-ils ? Comment faire en sorte qu’ils ne deviennent pas les outils de contrôle des autoritaires ? Comment saboter des prises de pouvoir online ? Mais, plus, largement, qu’avons-nous besoin de dire ou non via des messageries cryptées, qu’avons-nous besoin ou non de partager publiquement, pourquoi ? Ces questionnements de base sont vitaux pour ne pas faire d’un outil une fin en soi qui, par conséquent, finit par tout niveller : quand l’auto-défense numérique devient le but ultime, c’est l’émancipation de tous qui semble bien loin… Au fond, c’est une bien vieille question révolutionnaire, cruciale, qui se repose à nous : comment faire en sorte que certaines exigences d’efficacité ne prennent pas le pas de la critique permanente des mécanismes autoritaires ? Encore faut-il peut-être tout reprendre depuis le début : Signal est-il efficace, en quoi ?
Et enfin, parce qu’un peu de dérision dans les milieux militants fait toujours du bien : comment se défendre face à l’auto-défense numérique ?
C’est à partir de ces réflexions que nous vous proposons de discuter autour de l’utilisation de Signal, et des nouveaux modes d’organisations émergeant avec le numérique.

Innocents : The dreamers

Lundi 23 janvier 19h30

Bernardo Bertolucci – 2003
VOST (Royaume-Uni) – 116’

Paris, 1968, Isabelle et son frère jumeau Théo fréquentent régulièrement la Cinémathèque française tout comme Matthew, un étudiant américain réservé. C’est devant la Cinémathèque fermée lors des manifestations de protestation à la suite du renvoi de son directeur Henri Langlois qu’ils se rencontrent. Tous les trois passionnés de cinéma, tous les trois passionnés par eux-mêmes et leur rencontre, les jumeaux et Matthew vont vivre ensemble une aventure amicale et amoureuse intense, transgressive, malsaine, jusqu’à en oublier ce qui se passe dans la rue, jusqu’à ne plus pouvoir différencier son nombril, ses ressentis et le monde.

La déconstruction du judiciarisme, ça commence quand ?

Vendredi 3 février 19h30

Vendredi 17 février 19h30

« Sans avoir connaissance des termes de l’accusation ni, à plus forte raison, des suites qui pourraient lui être données, il lui fallait se remémorer toute sa vie, jusque dans les actes et les événements les plus infimes, puis l’exposer et enfin l’examiner sous tous ses aspects. »
F. Kafka, Le Procès

S’opposer à la Justice, en tant qu’institution, ainsi qu’à tout ce qui permet à cette machine à broyer de fonctionner, ses tribunaux, ses prisons, ses « peines alternatives », sa PJJ, ses JAP, sa psychiatrie de boucher, mais aussi à tous ceux qui la font vivre et agir, ses juges, ses procureurs, ses experts psychiatres, et bien sûr aussi à la police sur laquelle elle s’appuie, c’est une évidence pour tous ceux qui veulent en finir avec l’Etat et le capitalisme. Parce qu’elle est le pilier central de la défense de la propriété privée et des prérogatives de l’Etat, parce qu’elle sert les intérêts du capital, parce qu’elle menace directement tous ceux et toutes celles qui luttent, ou même simplement qui dévient de la voie royale de misère et d’obéissance qui est toute tracée. Mais entre révolutionnaires commencent les débats pour savoir si ce faisant on s’oppose à toute justice, toute prison, toute police, ou si c’est à celle de l’Etat actuel, et si on doit bien se résoudre à imaginer une utopie révolutionnaire avec une justice révolutionnaire, des prisons révolutionnaires, des experts psychiatres révolutionnaires, etc. On peut tout aussi bien remplacer « révolutionnaire » par « populaire » ou « du peuple ». A ce niveau-là, on peut dire que le débat est vite tranché, entre des conceptions autoritaires, qui s’opposent à l’Etat mais imaginent , que ce soit par pauvreté d’esprit ou par passion pour le pouvoir d’ailleurs, que des formes de justice et de coercitions ne peuvent que perdurer, et des conceptions anti autoritaires qui voient dans ces réinstitutions le début de la fin de toute émancipation. Le débat est vite tranché, certes. Mais il n’est pas forcément inutile de le raviver alors que certains révolutionnaires d’aujourd’hui continuent à rêver ouvertement d’une vraie Justice populaire avec ses bonnes prisons du peuple. De manière moins brutale, on retrouve aussi dans les aspirations à des formes de « justice alternative » trouvant bien souvent leur modèle dans des fantasmes de formes judiciaires passées, éloignées, voir « primitives », une manière de critiquer la Justice instituée comme n’étant pas la bonne justice, celle qu’on pourrait construire avec un peu de bonne volonté, une Justice vertueuse, enfin au service du Juste.
Ce que nous voudrions mettre en discussion est à un autre endroit de la réflexion sur le rapport au judiciaire, et ce que nous cherchons à couper à la racine, c’est bien le Juste lui-même, au-delà de critiquer ou de valoriser les formes anecdotiques de justice d’ici ou d’ailleurs. Quand nous parlons de « judiciarisme », nous cherchons à nous attaquer à tout ce qui judiciarise, à tous les niveaux de la vie, celui des institutions d’Etat, mais aussi dans les rapports familiaux, politiques, interpersonnels… Tout ce qui a aussi bien été intériorisé par les individus et qui se manifeste par des attitudes innocentistes ou (auto-)accusatrices. En effet considérer qu’il y a « judiciarisme », c’est considérer que l’institution judiciaire trimballe avec elle, au-delà de ce qui lui permet de fonctionner, une idéologie, un rapport au monde, qui, comme toutes les facettes du pouvoir qu’elle cherche à maintenir, se donne pour évident, presque naturel, et sert de miroir aux alouettes, ou de piège dans lequel tombent les révolutionnaires judiciaristes cités plus haut, qu’ils soient autoritaires ou anti autoritaires. Le judiciarisme, c’est cette idéologie intégrée qui considère que, quoiqu’on en pense, il y a des coupables et des innocents, qu’il est impossible de faire son deuil ou de réparer les conséquences d’un acte sans que quelqu’un soit condamné pour l’avoir commis, faisant même du procès une sorte de moment nécessaire du soin, et qu’en somme le fait de juger, de condamner et de punir sont des processus nécessaires à toute vie sociale. Le judiciarisme est par exemple très présent dans le rapport à l’éducation des enfants, avec la prévalence des vertus éducatrices de la récompense et de la punition. Il s’instaure même informellement dès lors que la régulation des conflits passe par l’établissement d’une culpabilité et la mise en œuvre d’une peine. Il pointe son nez dès qu’on se met à considérer qu’une justice serait apte à déterminer la vérité, comme en témoignent les comités « Vérité et justice pour » qui se sont succédés ces dernières années. Le judiciarisme est aussi un dispositif central de tous les systèmes moraux ou religieux, et si la justice de Dieu s’oppose à celle des hommes, il s’agit toujours de faire en sorte qu’une instance détienne le pouvoir de juger, de condamner et de punir. Que cette instance soit déifiée ou collective et autogérée, il s’agit toujours de valider qu’il y a besoin de juger, de condamner et de punir.
Mettre en discussion la question du judiciarisme c’est se demander comment aller au-delà du fameux « ni coupable ni innocent » et cesser réellement de réfléchir en termes d’innocence et de culpabilité. C’est identifier la place et le rôle du jugement et de la punition dans les rapports y compris extra-judiciaires, c’est aussi mesurer à quel point cesser d’intégrer ces principes comme naturels ouvre des perspectives émancipatrices que toute volonté de juger, de condamner et de punir referme immédiatement.

La Planète interdite

Lundi 6 février 19h30

Fred M. Wilcox – 1956
VOST (USA) – 98’

Dans un cadre de science fiction de type soap opera particulièrement réjouissant, ce film culte est avant tout l’histoire d’une transgression. En 2257, John Adams, dirige son vaisseau vers la planète Altaïr IV pour porter secours aux membres d’une expédition précédente disparus dix-neuf ans plus tôt avec leur vaisseau d’exploration, le Bellérophon. Alors que le vaisseau est en approche, le professeur Edward Morbius, ancien membre de l’expédition perdue, tente de dissuader fermement John Adams de se poser sur Altaïr IV : il n’a pas besoin d’aide et il ne pourra garantir la sécurité de l’équipage. Porté par son courage indiscernablement mêlé à une curiosité qui confine à l’ubris antique, John Adams décidera pourtant d’attérir sur la planète interdite. Si nous nous intéressons à ce film culte dont le scénario parcourt un lieu commun (l’épuipe qui part porter secours à une précédent équipe d’exploration disparue), sorti en pleine guerre froide, qui marquera et initiera bien des stéréotypes du genre, ce n’est pas seulement parce que c’est le premier film de science fiction en couleur et en cinémascope, ni parce que c’est aussi le premier film de science fiction dont la bande son, grandiose, utilise exclusivement des instruments électroniques (theremine, ring modulators, etc.), ni même pour l’esthétique géniale de son robot devenu lui même culte. Si ce film nous intéresse c’est avant tout parce que, deux ans à peine après la sortie du premier Godzilla, et 20 ans après King Kong auquel son affiche fait un clin d’oeil appuyé, on peut le voir aussi comme une première exploration du kaïju allégorie de l’inconscient, auquel l’univers fantastique donne vie, puissance et capacité incontrôlable de destruction. On peut citer le film Colossal qui explore aussi cet aspect du film de Kaïju, présent de manière beaucoup moins centrale dans les autres films d’un genre auquel La Planète interdite n’est pas ouvertement rattaché, entre autres parce que c’est surtout la science fiction qu’il a marqué. Le film, qui foisonne de références hétéroclites, de King Kong pour l’affiche aux mythes antiques (Bellerophone, la Gorgone, etc.) en passant par la Tempête de Shakespeare pour le scénario ou Jules Verne pour le mystérieux et tout puissant créateur de monde Edward Morbius, sorte de Capitaine Nemo de l’espace, est surtout porté par la mise en histoire des théories de l’école psychanalytiques de Jung, ce qui le relie aussi à Crisis Jung projeté il y a quelques temps à la bibliothèque. On passera donc 1h30 à explorer les méandres inconscients de la transgression, en compagnie de « the monster from the It », « le monstre venu du ça », comme le film lui-même le nomme…

Les diables

Lundi 6 mars 19h30

Ken Russell – 1971
VOST (Royaume-Uni) – 117’

Victime dès sa sortie des foudres de la critique, du public et des censures de tous pays, Les diables de Russell nous met face à une Bible de subversion religieuse dont les pages semblent avoir été trempées dans du LSD ; il nous met face à des images à double, triple voire quadruple sens, dont le kitsch chargé d’érotisme n’aurait pas déplu à Jérôme Bosch, maître des tableaux à clefs ; il nous offre le spectacle hallucinant d’une cité de Dieu flamboyante d’hérésie frénétique et carnavalesque. Jusqu’alors, le goût du scandale qui aiguillonnait Ken Russell n’avait produit que des documentaires peu intéressants ou des films à demi bâclés faute de financements qui lui eussent permis de le satisfaire jusqu’au bout. Le bouillonnement de la fin des années 60 lui ouvrit la voie d’un premier succès (Love) et le financement de plusieurs autres films sortis durant la même année de grâce 1971, dont celui qui nous intéresse.
Les Diables (qui sera projeté dans sa version non-censurée) retrace un fait divers qui agita une France du XVIIème siècle déchirée par les guerres de religion. Urbain Grandier, l’abbé libertin de Loudun, prétend protéger ses ouailles des hérésies qui contaminent l’Europe chrétienne. L’inquisition envoyée par le cardinal Richelieu découvre rapidement ce qu’il en est en interrogeant Jeanne des Anges, mère supérieure du couvent des Ursulines, qui avoue être possédée par l’abbé. Mais là où les inquisiteurs s’attendent à ce qu’elle sombre dans les méandres de la pénitence auto-mortificatoire en acceptant leur sentence, c’est le contraire qui se produit, le désir que Jeanne éprouve pour l’abbé ayant été exacerbé sous la torture. La chape de plomb religieuse s’effondre alors chez les nonnes qui s’adonnent à des orgies spectaculaires ; bientôt, c’est toute la ville de Loudun qui est libérée des carcans religieux, ses habitants réalisant au grand jour dans la cité aux murailles blanches les désirs qu’ils laissaient inassouvis ou ne réalisaient honteusement qu’à la faveur de la nuit, à l’ombre des églises. Mais ce qui se présente pour Richelieu comme un cas de possession collective par le diable et son lieutenant Grandier ne saurait rester longtemps impuni…

Entre théorie et intervention, regard sur l’épisode révolutionnaire de la Makhnovtchina

En raison du mouvement social et des appels à manifestations qui tournent pour se rassembler ce soir sur Paris, pour ne pas laisser retomber l’élan de révolte qui a explosé hier, la discussion initialement prévue ce soir à 19h30 est reportée à une date encore inconnue

Vendredi 17 mars 19h30

Aux Fleurs Arctiques nous nous sommes intéressés à plusieurs reprises à la Révolution bolchevique de 1917, c’est à dire à la prise du pouvoir en Russie par Lénine et son parti, et bien plus encore aux insubordinations et révoltes nombreuses et violentes qui ont eu lieu à l’encontre du parti communiste, et à leur répression. Nous pensons qu’il est important et utile de réfléchir collectivement à ce moment complexe de l’histoire des luttes, afin de mieux le comprendre et d’être ainsi capable d’en tirer des leçons au présent, au sein des luttes actuelles. Entre insubordinations, mouvements massifs ou marginaux, récupération et répression léninistes, espoirs et déceptions, cette période revêt mille facettes et les manières de s’y intéresser sont multiples ; c’est aussi bien un épisode qui a fait couler beaucoup d’encre chez les anarchistes, les communistes, autoritaires ou antiautoritaires, et les socdems.
Nous nous sommes déjà intéressés à la question de la possibilité de mettre en œuvre une perspective anti-autoritaire en période révolutionnaire par le biais de l’expérience que Victor Serge a laissé à la postérité des mouvements révolutionnaires. Cette fois-ci, nous allons en discuter à partir de l’intervention de Nestor Makhno, un anarchiste bien connu qui a été le meneur d’une armée en Ukraine qui au départ soutenait les bolchéviques contre les Blancs, avant qu’ils n’aient pressentis en eux les ennemis de demain et se soient mis à combattre contre eux. Plutôt que de sa vie privée ou de son iconographie, de son allure de révolutionnaire ou de son regard perçants, c’est bien de son intervention et de celle de ses compagnons et soldats dont il s’agira de parler, intervention qui ne pourrait se résumer en une phrase ou un dogme puisqu’elle a été changeante, parfois contradictoire, mais toujours dans une perspective révolutionnaire interventionniste. Avec la fin de sa vie, en France, s’intéresser à Makhno sera aussi une manière d’aborder ensemble les débats de l’époque qui n’ont pas rien à voir avec ceux de la nôtre, entre plateformisme et synthèse, refus de la forme d’organisation « parti » ou non, anarcho-léninisme et anarchisme anti-autoritaire, et bien d’autres encore.
Et puisque nous ne sommes résolument pas des historiens, ce détour par le passé lors d’une discussion publique nous permettra aussi de travailler ces autres questionnements, plus larges, qui circulent à la bibliothèque et ailleurs : comment nous rapportons-nous, dans une perspective militante et non pas historienne, à l’Histoire, et donc à des révolutionnaires du siècle dernier comme Makhno ?

Perfect Blue

Lundi 3 avril 19h30

Satoshi Kon – 1997
VOST (Japon) – 81’

Mima, une chanteuse de pop et idole japonaise décide de quitter son groupe afin de se lancer dans le cinéma, un choix complexe puisque sa personnalité de pop-star est plus qu’appréciée et cette transformation de carrière va grandement décevoir une partie de sa fanbase. C’est donc pleine de doute qu’elle commence à jouer dans une série. Mais un inconnu se faisant passer pour elle alimente un mystérieux site internet qui décrit la moindre de ses angoisses, mais aussi ses faits et gestes, de plus un colis piégé lui est envoyé durant un tournage, une succession d’action malveillantes qui vont la pousser dans une paranoïa hallucinatoire.
Ce thriller de Satoshi Kon nous invite à une réflexion sur le rapport aux célébrités qui se trouve totalement transformé par internet et les réseaux sociaux, sur le harcèlement de cours de récré qui se poursuit mais dans l’anonymat et à une échelle industrielle, sur les gens qui vendent leur image jusqu’à en crever comme d’autres vendent leur force de travail. Un questionnement traversé par l’image et la projection que l’on se fait de ceux qui vendent leur image et qui se retrouvent projetés.

Une journée particulière

Lundi 17 avril 19h30

Ettore Scola – 1977
VOST (Italie) – 105’

Le 6 mai 1938, Hitler rencontre Mussolini pour la première fois. Cette journée particulière, Ettore Scola nous la raconte du point de vue de deux personnes qui se voient forcées de rester à la maison lors de cet événement : Antonietta, mère de famille soumise au devoir conjugal, et Gabriele, présentateur de la radio nationale viré pour son homosexualité et menacé à tout moment d’être déporté. Avec en fond sonore la retransmission radio de l’événement, on voit Antonietta et Gabriele se défier l’un de l’autre, se rapprocher, se comprendre — se rencontrer, enfin, avant que la fin de la journée ne les ramène à la dure réalité du fascisme galvanisé désormais par cette autre rencontre…
Si jusque-là, Scola nous avait plutôt habitués à des comédies satiriques à l’italienne où le fascisme était seulement effleuré (Nous nous sommes tant aimés, Affreux, sales et méchants), ce drame intimiste est l’occasion pour lui de revenir sur là-dessus en nous montrant subtilement ce qu’il fut vraiment pour de nombreux individus : non simplement un régime politique populiste et autoritariste, mais le règne souverain d’un conformisme basé sur la peur de la déviance et des personnalités atypiques. En cela, le film pose une question que même les fétichistes du concept qui aiment circonscrire le fascisme à une période et un régime politique pourront apprécier à travers ce film  : sommes-nous réellement revenus du fascisme ?