Lundi 6 mars 19h30
Ken Russell – 1971
VOST (Royaume-Uni) – 117’
Victime dès sa sortie des foudres de la critique, du public et des censures de tous pays, Les diables de Russell nous met face à une Bible de subversion religieuse dont les pages semblent avoir été trempées dans du LSD ; il nous met face à des images à double, triple voire quadruple sens, dont le kitsch chargé d’érotisme n’aurait pas déplu à Jérôme Bosch, maître des tableaux à clefs ; il nous offre le spectacle hallucinant d’une cité de Dieu flamboyante d’hérésie frénétique et carnavalesque. Jusqu’alors, le goût du scandale qui aiguillonnait Ken Russell n’avait produit que des documentaires peu intéressants ou des films à demi bâclés faute de financements qui lui eussent permis de le satisfaire jusqu’au bout. Le bouillonnement de la fin des années 60 lui ouvrit la voie d’un premier succès (Love) et le financement de plusieurs autres films sortis durant la même année de grâce 1971, dont celui qui nous intéresse.
Les Diables (qui sera projeté dans sa version non-censurée) retrace un fait divers qui agita une France du XVIIème siècle déchirée par les guerres de religion. Urbain Grandier, l’abbé libertin de Loudun, prétend protéger ses ouailles des hérésies qui contaminent l’Europe chrétienne. L’inquisition envoyée par le cardinal Richelieu découvre rapidement ce qu’il en est en interrogeant Jeanne des Anges, mère supérieure du couvent des Ursulines, qui avoue être possédée par l’abbé. Mais là où les inquisiteurs s’attendent à ce qu’elle sombre dans les méandres de la pénitence auto-mortificatoire en acceptant leur sentence, c’est le contraire qui se produit, le désir que Jeanne éprouve pour l’abbé ayant été exacerbé sous la torture. La chape de plomb religieuse s’effondre alors chez les nonnes qui s’adonnent à des orgies spectaculaires ; bientôt, c’est toute la ville de Loudun qui est libérée des carcans religieux, ses habitants réalisant au grand jour dans la cité aux murailles blanches les désirs qu’ils laissaient inassouvis ou ne réalisaient honteusement qu’à la faveur de la nuit, à l’ombre des églises. Mais ce qui se présente pour Richelieu comme un cas de possession collective par le diable et son lieutenant Grandier ne saurait rester longtemps impuni…