E a été arrêté lors d’un contrôle préventif aux abords de la contre-manifestation du 20 février en opposition à Génération Identitaire. Et pour cause, il avait dans sa poche…son cadenas de vélo, que les flics, les juges et la procureure se sont entêtés à nommer « chaîne de vélo » et qui a été détruit à la fin de la procédure pour son caractère « dangereux et illicite ». Le motif d’interpellation est « port d’arme prohibé », et pendant la garde à vue, le chef d’accusation devient «participation à un groupement, en vue de la préparation de violences volontaires contre les personnes ou de destruction ou dégradation de biens », auquel s’ajoute le refus d’empreintes.
Lors de la comparution immédiate, la juge a cru bon de considérer que l’absence d’empreintes est une raison suffisante pour le nommer obsessionnellement « X se disant E » malgré son passeport biométrique, et pour l’envoyer en détention à Fleury, où il passera 10 jours, puisque suite au reversement de ses empreintes depuis les fichiers de la prison, il a été libéré lors de la première demande de mise en liberté.
Le fond de l’affaire a donc été jugé le 29 mars. Après que la proc nous a aimablement rappelé que lorsque qu’on choisit de vivre en société, on a des droits ET des devoirs, « sinon c’est l’anarchie », E. a refusé de répondre aux questions du juge puis a repris la parole pour déclarer :
« Arrêtons de raconter n’importe quoi, vous avez un nombre de policiers et de caméras effarant, vous avez développé la reconnaissance faciale, vous avez mon passeport biométrique, vous avez pris mes empreintes en prison, vous m’avez fiché : vous savez qui je suis. Par ailleurs votre justice m’a déjà puni, vous m’avez fait passer dix jours à Fleury-Mérogis. Ma fiche S va me suivre et me faire chier pendant encore longtemps. Mais tout ça n’est pas bien grave parce que pendant que nous parlons, à Bristol comme ailleurs dans le monde, ça brûle. Vous pouvez taper autant que vous voulez avec votre petit marteau sur votre bureau, vous pouvez continuer à envoyer des gens en prisons tout la journée comme vous l’avez fait aujourd’hui, ça n’y changera rien. Pour finir, mes intentions ne vous regardent pas, elles pourraient être de brûler toutes les prisons du monde ou de me faire un délicieux café, elles ne vous regardent pas. »
La procureure, qui assume le fait que la préventive a déjà été une forme de punition, ne requiert « que » 140 h de TIG avec 3 mois de prison s’il ne sont pas effectués. Le juge, qui ne manque pas d’humour – il vient d’envoyer 9 mois en prison un jeune majeur handicapé mis à la rue par l’ASE qui cherchait un endroit pour dormir et qui s’est fait défoncer par un citoyen-vigile – précise à E qu’il peut refuser les TIG, (ce qu’il fera évidemment), parce que « le travail forcé est interdit en France ».
Le délibéré laisse sans voix : le juge abandonne de sa propre initiative les charges initiales (groupement et refus d’empreintes), désavouant ainsi complètement le travail de la proc et des flics, et leur substitue un « port d’arme de catégorie D », en l’espèce un cadenas de vélo, pour lequel il attribue à E., quand même, 3 mois avec sursis. Dans cette logique toute judiciaire, donc, si E. se fait contrôler un cadenas de vélo en poche en sortant de chez lui, son sursis pourrait être révoqué…
Nous nous faisons un plaisir de faire appel à partir de cette incrimination absurde : à suivre, donc !
FICHTRE ! LA FICHE SECRÈTE EST FICHUE !
Au cours de l’audience, l’avocat a pu souligner à quel point il s’agissait d’une procédure bien plus policière que judiciaire. En effet, une pièce « sensible » avait été transmise au juge par mail et nous avions décidé que la demande serait faite qu’elle soit versée au dossier. Le juge s’est donc vu contraint de lire la fiche S de E. en audience, puisqu’elle faisait partie intégrante des pièces du dossier, avec l’air dégoûté de celui qui se salit les mains avec des relents de bruits de fond de couloirs de commissariat, et tout en affirmant que la justice ne devait pas en tenir compte.
E a donc appris à cette occasion qu’il était fiché depuis le 26 novembre 2020 en tant que « militant de la mouvance contestataire radicale susceptible de se livrer à des violences » et, comble du ridicule vu la situation, s’est entendu lire qu’il devait : « ne pas être avisé de l’existence de la présente fiche ».
Le caractère policier de ce procès qu’on pourrait dire « de renseignement » s’est aussi traduit par une pression policière minable, à la limite du harcèlement, par les flics du tribunal : contrôle d’identité pour non port du masque à des personnes qui en portaient un, E. menacé d’une amende pour avoir jeté son mégot par terre, appuyé d’un « on t’attend à la sortie »…
Déjà à la DML, pour quelques stickers collés dans le tribunal, les flics avaient forcé deux personnes à se placer devant des caméras pour être comparés par vidéo aux images qu’ils croyaient détenir du suspect des collages intempestifs.
Rendre les plus publiques possibles ces formes de fichages faites pour intimider et mettre la pression dans les couloirs des comicos et des tribunaux, comme nous le faisons ici, nous semble primordial.
A chaque occasion, faisons en sorte que les fiches « Secrètes » soient versées aux dossiers et rendues publiques !
Continuons à refuser notre propre fichage !
Nos intentions nous regardent mais leurs fiches regardent tout le monde !
Feu aux prisons et aux tribunaux !
Camarades et compagnons solidaires de E.
contact : mothrarising@riseup.net
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