Vendredi 16 mai – 19h30
En mai seront examinés au parlement deux textes relatifs à la fin de vie, dont l’un à propos d’une légalisation du suicide assisté renommé dans ce cadre « aide active à mourir » (terminologie qui en elle-même invite déjà à être débattue !). D’après ce projet de loi, les patients atteints d’une « affection grave et incurable » pourront demander un suicide assisté, à condition d’être majeurs, français, en mesure « d’exprimer leur volonté de façon libre et éclairée », et d’éprouver des « souffrances physiques et psychologiques réfractaires et insupportables ». Comme dans d’autres pays, c’est principalement la gauche qui encourage un telle dynamique de légalisation de formes d’euthanasie, y défendant un droit et une liberté, y voyant un progrès, et parfois traçant un parallèle entre le « mon corps, mon choix » du droit à l’avortement et le désir de mettre fin à ses jours. La Colombie, les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg et depuis 2021 l’Espagne ont légalisé l’euthanasie, tandis que neuf états américains ont légalisé le suicide assisté (la différence avec l’euthanasie étant que la personne s’administre elle-même la substance létale). Des pays comme la Suisse et l’Italie tolèrent également le suicide assisté, bien qu’aucune loi ne vienne légiférer à son propos. Enfin, l’arrêt des traitements à la demande des patients est légalisé dans de nombreux pays. Nous proposons de nous pencher sur ces différents contextes sociaux et politiques afin de discuter à la bibliothèque des implications sociales de ces différentes législations, notamment sur les plus précaires, les « indésirables » du capitalisme et les moins productifs, mais pas seulement, et afin de prendre à bras le corps la question de savoir si aider quelqu’un à mourir peut-il être un soin. Cela soulève bien entendu des enjeux existentiels et éthiques irréductibles à la politique, mais les manières de traiter de cette question sans émettre aucun lien avec la politique, la critique du capitalisme, du travaillisme et plus largement des rapports sociaux sont déplorables (on peut ici penser au dernier film de Pedro Almodovar, La chambre d’à côté, qui met en scène une défense du suicide assisté en dépolitisant et décontextualisant complètement le sujet, comme s’il ne s’agissait que d’une pure décision de volonté individuelle). Nous chercherons donc à articuler avec la perspective révolutionnaire anti-autoritaire des réflexions autant politiques que plus largement existentielles sur ce sujet, afin de dégager, enfin, un espace possible à des positionnements qui ne se ramènent pas au schéma parlementaire actuel d’une opposition légaliste entre progressismes pro-euthanasie et réactions anti-euthanasie sous couvert de traditions, de religions et de main-mise sur l’individu. N’oublions jamais la saine méfiance à l’égard de tout ce qui cherche à légiférer sur la vie comme sur la mort, et tentons de débattre avec, on l’espère, plein de fertiles désaccords !